TREND
InCapsule en veille sur les signaux apparaissant dans la société, souhaite partager avec ses lecteurs cette réflexion sur la tendance de l’intelligence collective qui s’est confirmée massivement durant la crise actuelle.
Clairement, il est difficile aujourd’hui de prédire si les multi solidarités que nous observons de la part de l’ensemble des acteurs de la société française vont perdurer après la crise.
Ce qu’il est intéressant d’observer c’est que la crise du coronavirus a réveillé l’intelligence collective. Pas seulement dans le monde de la recherche et des soignants, qui ont été les premiers à agir, à collaborer. Pour les médecins et soignants en se référant au serment d’Hippocrate ou à leur devoir. Et pour les chercheurs à activer leur fonctionnement en réseau préexistant. Nous ne disons pas cela pour laisser entendre que tout ce qu’ils font est normal. Mais d’une certaine façon, cela se situe dans la continuité de leur métier, parfois au péril de leur vie malheureusement.
Cette crise en fait a activé d’autres formes d’intelligence collective qui étaient déjà en germe.
Comme celles des makers, travaillant en communautés de compétence. Ainsi par exemple, grâce à la plateforme: Just One Giant Lab (JOGL), des biologistes, ingénieurs, data scientists, développeurs sont parvenus à créer à bas coût et en open source des solutions contre le virus (test de diagnostic créé en 4 semaines). Ils ont été ainsi plus de 60.000 internautes venant de 183 pays, dont 3.000 actifs à collaborer sur cette plateforme, générant plus de quatre-vingt-dix projets, en un temps très court, allant du design de masques de protection à des prototypes de ventilateurs. Pour la petite histoire, Just One Giant Lab (JOGL) est un laboratoire d’open innovation dédiée à résoudre des problématiques d’intérêt général : sanitaires, environnementaux, sociaux et humanitaires et répondre aux objectifs de Développement Durable définis par les Nations Unies. Il est clair, qu’une pratique comme celle-ci se généralisera dans le futur, mais à condition, que l’enjeu soit suffisamment essentiel pour créer la mobilisation.
Cette crise a aussi mis en lumière de nouvelles formes de solidarité et d’intelligence collective émanant de nombreuses parties prenantes de la société, des plus macro au plus micro, comme :
Les entreprises françaises sont allées puiser au cœur de leur savoir-faire, quitte à faire bouger les affectations de leur appareil industriel. Ainsi les créateurs de mode se sont mis à faire des masques, les parfumeurs du gel hydro alcooliques, l’aviation civile se mettre au service de la défense pour transporter médecins et personnels. Les entreprises françaises ont certainement compris qu’elles avaient aussi une mission importante, défendre le local. Comme l’industrie textile lourdement affectée par le Coronavirus dont l’épidémie a commencé en Chine, l’atelier du monde. Cette industrie est en train de comprendre l’importance de relocaliser la filière française, de la production de matières premières écologiques à la fabrication de vêtements. De même dans l’alimentaire, le locavorisme qui était devenu au fil de ces dernières années un mode de vie répondant à des besoins de traçabilité (savoir ce que l’on mange) va de plus en plus correspondre à un moyen de nous rendre autonome vis-à-vis des autres puissances économiques.
Et pour ce 1 mai, nous n’en pouvons pas passer à côté de l’initiative “brindesolidarité” lancée par Lilyval, en vue de permettre à chacun d’offrir à distance du muguet aux soignants… témoignant de l’espoir et du bonheur prochain qu’on leur souhaite….
Cette entreprise française familiale Lilyval a visé plusieurs objectifs :
- récolter des dons des particuliers pour offrir du muguet, la fleur porte-bonheur, au personnel de santé,
- contribuer 10 % du bénéfice à la Fondation pour la Recherche Médicale
- ainsi que maintenir la production, pendant la courte saison du muguet, qui fait vivre plusieurs centaines de saisonniers.
La grande distribution n’est pas en reste non plus en jouant la solidarité entre enseignes pourtant concurrentes. Nous notons cette initiative éloquente de 3 magasins en Gironde (Système U, Intermarché et Leclerc) qui ont décidé de ne pas ouvrir le dimanche matin pour permettre aux salariés de se reposer de « leur mission de service public », terme repris dans leur courrier. Ceci a été clairement signifié à l’ensemble du personnel, par une lettre co écrite et co signée des 3 propriétaires de magasin pourtant concurrents, comme la grande distribution sait l’être.
Les associations élargissent leur périmètre pour s’unir et travailler en commun sur les enjeux de la crise actuelle. Ainsi par exemple, une jeune association dédiée à l’enseignement du français pour les migrants (La Fourmilère) propose à ses élèves réfugiés en France, d’écrire des petits mots aux personnes âgées en Ehpad grâce à l’association « 1 lettre, 1 sourire ».
Les particuliers aussi se rapprochent face à cette crise, en créant des réseaux de solidarité. Comme par exemple, des cagnottes dédiées aux caissières des magasins d’alimentation de proximité et hyper exposées. Ou ces nouvelles formes de rassemblement le soir, qui en plus d’applaudir le personnel soignant, permettent aux personnes d’un même immeuble ou d’un même quartier de co-créer des concerts collectifs, animant ainsi ces journées de confinement.
Les applis s’adaptent aussi à la crise comme l’appli anti gaspi « Too Good To Go » qui propose à ses mobinautes, deux types de paniers, un dit « nécessaire » d’une valeur de 30 euros ou plus, et un panier « solidarité» pour aider les commerces de bouche à se convertir à la vente à emporter.
Les stars, les chefs, qui ne craignent pas de transférer leur expertise au grand public en révélant leur secret culinaire, en donnant des cours de coupe de cheveux… Nous avons repris cette citation des équipes de JR, du REFETTORIO MADELEINE Paris et JF Rial mobilisés pour agir de façon concrète en fournissant des repas aux sans-abris justifiant ainsi leurs actions : « On aurait pu dire ce qu’on aurait fait de mieux si on était Premier Ministre, donner un avis sur l’utilisation de l’hydrochloroquine, ou prodiguer des conseils pour bien vivre le confinement, mais on s’est dit qu’on serait plus utile aux côtés de ceux qui sont en difficulté en ce moment. »
Des exemples comme ceux cités se démultiplient de façon considérable. Chacun à son niveau cherche à agir à sa façon, en puisant dans ses compétences et en apportant sa contribution au pot commun et le plus souvent exprimée avec modestie. Chaque acteur (entreprise, association, célébrité, app…) se comporte comme une entreprise « purpose-driven », se donnant un rôle sociétal. Nous reprendrons à dessein ce terme utilisé dans le monde des grandes entreprises. N’est-ce pas le signe que cette crise d’une certaine façon est peut-être en train de prouver, qu’il n’est pas si compliqué d’agir et d’être solidaire.
Toute la question demeure cependant, que restera-t-il après la crise ? La caissière que nous louons et pour lequel on fait des dons sur Leetchi, serons-nous toujours aussi patients vis-à-vis d’elle lorsque les magasins rouvriront ? Les voisins avec qui nous avons chanté et dansé à nos balcons, garderons nous le lien et construirons nous autre chose après ? Le futur nous le dira. En tout cas, dans le métier des études et du conseil nous suivons de près ces mutations qui s’opèrent dans les comportements. Une chose est sûre cependant, des nouveaux standards seront nés dans le monde du business, et les entreprises auront tout à gagner à poursuivre les voies solidaires et à fonctionner au service du collectif. Difficile pour elles de revenir en arrière au risque d’être taxées d’opportunistes.
PAROLES
“Le coronavirus a réveillé l’intelligence collective mondiale.” Le co-fondateur de Just One Giant Lab, Marc Santolini.
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