Quelques mois après l’assassinat du professeur d’histoire-géographie à Conflans-Sainte-Honorine et six ans après les tragiques attentats de janvier 2015, l’Ifop pour la fondation Jean Jaurès et Charlie Hebdo a mesuré le niveau de contestation de la laïcité et des formes de séparatisme à l’école.
En matière de restauration scolaire, 40 % des professeurs interrogés affirment avoir eu affaire à des incidents liés à la contestation du principe de laïcité dans l’assiette, soit 5 points de plus que l’étiage observé en janvier 2018. Cette situation de remise en question du caractère laïc des institutions étatiques semble également se traduire dans les enseignements dispensés à l’école : 27 % des professeurs d’éducation physique et sportive disent avoir déjà observé au cours de leur carrière d’enseignant des formes de contestations au nom de la religion dans leur matière et 26 % des enseignants affirment la même chose lors d’enseignements abordant la laïcité. Au total, 53 % des enseignants interrogés ont observé de la part d’élèves au moins une fois des formes de contestation au nom d’une religion.
En outre, 53 % des professeurs affirment que certains enseignements font l’objet de contestations et que certains élèves ont même tenté de s’y soustraire, soit une augmentation de 7 points depuis 2018.
La confrontation à des formes de séparatismes religieux peut se constater sous diverses formes. Ainsi, 65 % des enseignants disent avoir déjà observé des absences liées à l’exercice d’un culte ou à la célébration d’une fête religieuse, ce qui ne peut toutefois apparaître comme une question revendicative car l’absence pour raison religieuse sur les jours de classe, qui ne concerne donc que les pratiquants autres que catholiques, est tolérée pour certaines fêtes par l’Education nationale. Néanmoins, ils sont 45 % à avoir constaté au cours de leur carrière des absences de jeunes filles à des cours de natation (avec ou sans certificats médicaux) et 28 % des refus d’entrer dans les lieux à caractère religieux (type Eglise) lors de sorties scolaires.
Concernant les réactions autour de cérémonies en l’honneur de Samuel Paty et de la question des caricatures, 19 % des enseignants sondés disent avoir observé une forme de contestation lors des cérémonies. Cet étiage double presque en fonction de la zone dans laquelle se trouve l’établissement : « seuls » 14 % des professeurs hors REP (Réseau d’Education Prioritaire) disent avoir connu ce phénomène contre 34 % des professeurs en REP (+ 20 points de différence). A noter également que le secteur privé semble plus poreux sur les questions de séparatisme puisque 15 % des professeurs exerçant dans le privé pensent que le professeur d’histoire-géographie assassiné n’aurait pas dû faire ce cours (contre 8 % dans le secteur public).
Découvrez l’analyse de Iannis Roder, professeur d’histoire-géographie et directeur de l’Observatoire de l’éducation à la Fondation Jean Jaurès : https://jean-jaures.org/nos-productions/les-enseignants-de-france-face-aux-contestations-de-la-laicite-et-au-separatisme