Alors que la crise sanitaire a, pour la deuxième année consécutive, un impact sur l’organisation du baccalauréat, cette étude de l’Ifop pour la Maif met en évidence une certaine inquiétude des lycéens dans un contexte de mise en place du nouveau Baccalauréat. Réalisée auprès d’un échantillon national représentatif de 1 000 lycéens et de 1 000 Français – dont des parents de lycéens –, cette étude montre que parents et lycéens sont loin d’être enthousiastes à l’égard du nouveau Bac et des conditions de préparation imposées par la situation sanitaire.
1) La crise sanitaire, une source d’angoisse qui pèse sur l’appréciation de la session 2021
Cette enquête Ifop/Maif montre que les élèves craignent, comme leurs parents, que le baccalauréat obtenu cette année soit perçu comme un diplôme au rabais.
- 71% des lycéens craignent que les candidats de cette année obtiennent un « bac dévalué » par rapport aux précédentes sessions, soit une proportion très similaire à celle mesurée chez les parents d’élèves scolarisés dans un lycée (77%). Ce sentiment d’inquiétude prend sans doute racine dans le taux de réussite très élevé du baccalauréat 2020 (95%) qui a, lui aussi, été aménagé en raison de la crise sanitaire.
- De même, les conditions de scolarité en général, et de préparation du Bac en particulier imposées par la situation sanitaire sont loin de susciter l’enthousiasme des élèves : près des deux tiers des lycéens (64%) estiment que l’enseignement à distance est « moins efficace » que celui en présentiel pour suivre les cours, contre un quart (24%) qui le considèrent comme « aussi efficace » et 9% comme « plus efficace ».
Et dans le détail des résultats, les lycéens les plus critiques envers l’enseignement à distance sont aussi les plus « favorisés » et souvent les plus « investis » dans leur scolarité, à savoir les enfants de cadres et professions intellectuelles supérieures (72%, contre 62% des enfants issus des catégories populaires) et ceux en filière générale et technologique (68%, contre 55% en filière professionnelle).
2) Le « bac au rabais », une crainte toute sauf nouvelle
Cette crainte d’un bac « dévalué » par la crise se doit toutefois d’être recontextualisée au regard d’enquêtes passées qui montrent que la peur d’un nivellement par le bas du bac remonte déjà à plusieurs années.
- 61% des Français considèrent que le bac est moins difficile à réussir aujourd’hui qu’il y a une génération, soit un taux quasiment deux fois supérieur à celui observé il y a quarante ans (34% en 1978). Mais cette idée que le « niveau baisse » imprègne déjà les opinions des Français depuis au moins une quinzaine d’années si on juge la proportion déjà élevée de personnes qui partageaient ce point de vue en 2008 (60%).
- Mais du côté des lycéens qui doivent, eux, passer l’examen, les avis sont plus nuancés : seuls 39% jugent le bac plus facile en 2021, contre 25% le trouvant plus difficile et 36% ni plus difficile, ni moins facile.
3) Parents et lycéens donnent aussi des mauvais points à la réforme du Bac
- Exacerbée par le contexte sanitaire, cette inquiétude s’inscrit dans un contexte plus général de mise en œuvre de la réforme du lycée. Or, la politique portée par Jean-Michel Blanquer recueille des avis pour le moins contrastés : si une majorité de parents de lycéens (58%) estime la réforme nécessaire pour moderniser le bac et le lycée, seuls 40% la considèrent « bien menée pour moderniser le lycée ».
- Aussi, on observe une forme de pragmatisme teintée d’ambivalence dans la manière dont les lycéens perçoivent le « nouveau bac » : taillé sur mesure, il est considéré par deux tiers comme plus avantageux pour la suite des études (67%) ; moins lisible, il ne constitue un avantage pour trouver un emploi que pour la moitié des lycéens (52%). Le contrôle continu, quant à lui, est perçu par trois quarts comme plus juste et plus facile que les épreuves classiques du bac mais, dans le même temps, 58% prédisent qu’il va renforcer les inégalités entre lycées, crainte que monte à 67% en éducation prioritaire et 66% en Ile-de-France…
- Si la mise en place des enseignements de spécialité emporte quant à elle une adhésion majoritaire, elle n’en laisse pas moins un tiers des lycéens « sur le carreau». Ainsi, 31% des élèves de première et terminale affirment que les spécialités suivies actuellement ne leur plaisent pas, qu’ils les aient choisies (22%) ou subies (9%). C’est notamment le cas chez les élèves de première (37%), qui se heurtent à cette réalité, et des lycéens les plus marginalisés par le système de sélection actuel : 36% chez les enfants de CSP-, 41% chez ceux estimant que le bac est plus difficile aujourd’hui.
- Et ce mécontentement semble très corrélé au manque d’information ressenti par ces élèves au moment de choisir ses enseignements de spécialité : 30% élèves de première et terminale déclarent avoir été mal informés sur les matières disponibles et leurs débouchés. Ici encore, enfants d’ouvriers et employés (41%) et lycéens trouvant le bac plus difficile qu’avant (45%) sont surreprésentés.
4) Malgré l’incertitude, le bac reste un diplôme indispensable
- Cette crainte d’une dévaluation de l’examen est d’autant plus problématique que les jeunes accordent toujours une grande importance au Bac. Ainsi, une grande majorité des lycéens perçoivent le baccalauréat comme une chose importante pour eux (86%, dont 41% comme une chose « très importante ») et, davantage encore, pour leurs parents (95%, dont 64% comme une chose « très importante »).
- Pour la plupart des lycéens (57%), le baccalauréat est encore avant tout un diplôme indispensable, soit un atout essentiel. Un sésame encore plus fortement perçu comme tel par les lycéens de banlieue populaire (75%). En effet, le bac est largement considéré comme une bonne préparation aux études supérieures (78% des lycéens) et un atout sur le marché du travail (73%), voire pour plus de la moitié des répondants comme obligatoire pour obtenir un emploi (59%).
- Malgré l’inquiétude qu’il suscite, les lycéens semblent néanmoins globalement considérer cet examen comme un rite de passage légitime et rares sont ceux (31%) qui pensent qu’il faudrait le supprimer.