Alors que le quinquennat d’Emmanuel Macron semble se situer à un de ces tournants souvent propices à s’interroger sur l’évolution des équilibres politiques dans la perspective des prochaines élections européennes, l’Ifop a réalisé pour L’Opinion une intention de vote européenne à six mois de cette première élection intermédiaire.
Loin d’inverser les dynamiques observées lors des dernières mesures réalisées, la séquence ouverte par la mobilisation des « gilets jaunes » est plutôt de nature à les confirmer. Ainsi, l’avantage du Rassemblement National (RN) vis-à-vis de La République en Marche (LREM) tend à s’accroître : avec 24% des suffrages exprimés (+2 points par rapport à la dernière mesure prise à la mi-novembre), la liste soutenue par Marine Le Pen affiche désormais une avance de 6 points sur la liste de LREM et du Modem (18%, -1 point).
Plus généralement, à l’instar du RN ou de Debout La France (DLF), ce sont les formations politiques dont les sympathisants soutiennent fortement la mobilisation des « gilets jaunes » qui voient leurs scores s’orienter à la hausse : l’exemple le plus caractéristique étant celui de la liste DLF soutenue par Nicolas Dupont-Aignan qui rassemblerait désormais 8% des suffrages exprimés, soit un gain de deux points par rapport à la dernière mesure. Le mouvement de Jean-Luc Mélenchon constitue toutefois un contre-exemple notable : malgré un soutien majoritaire des sympathisants de La France Insoumise (LFI) aux « gilets jaunes », la liste de LFI n’en profite pas et perd un point à 9%. Encore plus saillante est la difficulté de Jean-Luc Mélenchon à réunir de nouveau son électorat de mai 2017 : moins d’un de ses électeurs au premier tour de la présidentielle de 2017 sur deux (45%) voterait pour la liste LFI lors des prochaines européennes.
Par ailleurs, au-delà du cas de La France Insoumise, ce sont l’ensemble des partis situés à la gauche du spectre politique qui sont à la peine puis qu’aucun ne parvient à dépasser le seuil de 10% des suffrages ; bien que la liste d’Europe Écologie Les Verts progresse d’un point pour atteindre un score non négligeable de 8%.
Dans ce paysage politique éclaté, les partis qui ont alternativement gouverné la France depuis près de quatre décennies apparaissent toujours plus affaiblis : la liste du Parti Socialiste (PS) tombe à 4,5% (-1,5 point) et celle des Républicains (LR) à 11% (-2). D’ailleurs, là aussi, les électeurs de Benoît Hamon et de François Fillon en 2017 ont majoritairement tendance à se détourner respectivement de la liste PS soutenue par Olivier Faure et de la liste LR soutenue par Laurent Wauquiez lors des prochaines élections européennes : 39% des électeurs de Benoit Hamon en 2017 voteraient pour la liste PS et 44% des électeurs de François Fillon pour la liste LR.