Cette nouvelle enquête Ifop pour la JNA présente des résultats inédits sur l’exposition au bruit en situation de télétravail. En effet, plus d’un actif sur deux en télétravail (53%) déclare être gêné par le bruit et les nuisances sonores sur son lieu de travail. Pour plus de 80% des télétravailleurs, la pollution sonore a des répercussions sur leurs comportements et dégrade leur qualité de travail. Alors que la gêne auditive provoque des difficultés de compréhension de la parole lors de conversations téléphoniques pour 50% des actifs en poste, cette proportion s’élève à 65% chez les télétravailleurs.
1 actif en poste de travail sur 2 déclare être gêné par le bruit et les nuisances sonores sur son lieu de travail
La perception d’une gêne causée par le bruit et les nuisances sonores sur le lieu de travail est toujours majoritaire et se trouve davantage impactée par le recours massif au télétravail depuis le début de la crise sanitaire.
L’expression de la gêne causée par le bruit et les nuisances sonores sur le lieu de travail est toujours conséquente (53%) bien qu’enregistrant une baisse significative de 6 points par rapport à l’année passée (59%). Ce constat peut s’expliquer en partie par la crise sanitaire du Covid-19 qui a pu inciter les Français à se concentrer sur des menaces de santé à plus court terme.
En outre, l’intensité de cette baisse est limitée dans la mesure où la proportion de répondants qui se déclarent gênés souvent (18%) est relativement stable par rapport à 2019 (- 1 point), la baisse de la gêne étant portée par les personnes qui la ressentent « de temps en temps » (35%, -5pts VS 2019).
Les hommes se déclarent davantage concernés par le bruit et les nuisances sonores que les femmes (57% VS 49%). A l’instar des années précédentes, les catégories populaires sont plus perturbées par les nuisances sonores que les CSP+ (57% VS 46%), notamment les ouvriers (64% VS 53% en moyenne). De même, les actifs de l’agglomération parisienne (où figure une plus forte proportion d’entreprises de grandes tailles) sont davantage affectés par les nuisances sonores sur leur lieu de travail que les habitants des communes rurales (67% VS 44%).
66% des télétravailleurs réguliers (2 à 3 jours par semaine) sont confrontés au bruit et aux nuisances sonores sur leur lieu de travail
Enfin, un nouveau facteur différenciant dans la perception du bruit sur le lieu de travail apparaît cette année, marquée par la pandémie mondiale et le confinement : la pratique du télétravail. Un tiers des actifs en poste (34%) déclare travailler à distance depuis la crise sanitaire liée au Covid-19 (contre environ 25% selon d’autres enquêtes IFOP en 2019). Dans le détail, 10% indiquent « télétravailler » tout le temps ou la plupart du temps (4 à 5 jours par semaine), 12% de façon régulière (2 à 3 jours par semaine) et 12% de temps en temps (moins de 2 jours par semaine).
Le télétravail, qui s’est généralisé ces derniers mois en France suite à l’épidémie de coronavirus, concerne davantage les répondants masculins que féminins (38% VS 31%) ainsi que les jeunes générations, puisque 40% des moins de 35 ans déclarent télétravailler (VS 32% des plus de 35 ans).
Assez logiquement, le télétravail est une pratique largement adoptée par les CSP+ (59%), et notamment les cadres et professions intellectuelles supérieures (65%), dont les activités peuvent être effectuées à distance via les outils numériques et collaboratifs ; les CSP-, en revanche, doivent souvent se rendre sur place et ne sont que 22% à télétravailler (VS 34% en moyenne).
Or, les personnes en télétravail depuis le début de la crise sanitaire sont plus sujettes aux nuisances sonores que la moyenne (57% VS 53%). 66% des personnes indiquant télétravailler de façon régulière (2 à 3 jours par semaine) sont ainsi gênées par le bruit sur leur lieu de travail.
Autre constat lié à la crise sanitaire, une majorité d’actifs en poste (53%) affirme connaître des difficultés auditives depuis l’obligation du port du masque sanitaire, dont 32% « souvent » et 21% « rarement ». Ici, ce sont les femmes qui sont plus concernées (57% VS 49% des hommes), à l’instar des moins de 35 ans (61% VS 50% pour les plus de 35 ans).
Le bruit provenant de l’extérieur des locaux et les matériels utilisés sont identifiés comme sources de bruit les plus gênantes sur le lieu de travail. Ces sources sont citées par respectivement 38% et 31% des répondants au total. Si le classement reste stable par rapport à 2019, on note un léger recul des matériels utilisés (-2pts) au profit des conversations téléphoniques (+3pts) qui se sont probablement accrues avec la hausse du télétravail. Le clivage social évoqué l’an passé dans la hiérarchie des sources de bruit les plus gênantes se confirme : là où les matériels utilisés restent la source de bruit la plus citée par les ouvriers (40% VS 31% en moyenne), les cadres et professions intellectuelles supérieures sont dérangées en priorité par le bruit provenant de l’extérieur des locaux (44% VS 38% en moyenne). Les cadres sont également plus nombreux à mentionner les conversations téléphoniques (36% VS 29% en moyenne), à l’instar des personnes en télétravail (39%).
Pour les personnes qui télétravaillent tout le temps ou la plupart du temps, les conversations téléphoniques constituent même la source de bruit la plus gênante (41% VS 29% en moyenne).
Les travailleurs indépendants, quant à eux, semblent moins perturbés par le bruit et les nuisances sonores : 34% d’entre eux répondent ainsi n’être gênés par aucune source de bruit (+14pts VS en moyenne).
Parmi les actifs gênés par les nuisances sonores sur leur lieu de travail, 84% estiment que le bruit a des répercussions sur leurs comportements et 65% sur l’apparition de troubles auditifs…
L’impact des nuisances sonores sur la santé est davantage reconnu, l’apparition de troubles auditifs étant la conséquence négative qui progresse le plus.
Parmi les personnes gênées par les nuisances sonores sur leur lieu de travail, la très grande majorité s’accorde à affirmer que celles-ci ont des répercussions sur leur travail et leur santé que ce soit leur comportement tels que la fatigue, la nervosité ou l’agressivité (84%), la qualité de leur travail (73%), l’équilibre général de leur santé (73%) ou l’apparition de troubles auditifs (65%). Il est intéressant de noter que toutes ces externalités négatives progressent depuis 2018, et notamment dans la proportion de personnes répondant « Oui, tout à fait » : ainsi 32% des répondants affirment que la gêne occasionnée par le bruit sur leur lieu de travail est « tout à fait » susceptible d’avoir des répercussions sur leur comportement (VS 29% en 2018), 23% sur la qualité du travail fourni (VS 19% en 2018) et 24% sur l’équilibre général de leur santé (VS 20% en 2018). L’apparition de troubles auditifs est l’élément qui connaît la plus forte hausse, cité cette année au total par 65% des répondants (contre 57% en 2018).
Dans le détail, les répercussions négatives du bruit et des nuisances sonores concernent moins les jeunes actifs : en effet, 79% des moins de 35 ans déclarent que la gêne occasionnée par le bruit pourrait avoir des conséquences sur leur état de fatigue, de nervosité (VS 85% des plus de 35 ans) et 65% sur l’équilibre général de leur santé (VS 76% des plus de 35 ans).
…tous les secteurs d’activité sont impactés même si ceux naturellement dits exposés au bruit demeurent plus concernés
On note toutefois de fortes disparités en fonction des secteurs d’activités. Les travailleurs du BTP sont plus sujets aux dommages physiques et psychologiques dus au bruit sur leur lieu de travail, puisqu’ils sont 79% à évoquer à la fois des effets sur l’équilibre général de leur santé (VS 73% en moyenne) et sur l’apparition de troubles auditifs (VS 65% en moyenne). Par ailleurs, les cadres et professions intellectuelles supérieures sont ceux qui mentionnent le plus l’impact des nuisances sonores sur la qualité de leur travail (82% VS 73% en moyenne). Les actifs travaillant dans le commerce, quant à eux, semblent davantage souffrir des répercussions du bruit sur leur comportement (92% VS 84% en moyenne). Le secteur administratif n’est pas en reste puisque 78% des personnes concernées déclarent que les nuisances sonores affectent la qualité de leur travail (VS 73% en moyenne).
Enfin, la fréquence de télétravail influe fortement sur les réponses que ce soit donc sur la santé et sur la productivité. Les personnes télétravaillant 4 à 5 jours par semaine se déclarent en effet davantage susceptibles de subir des répercussions suite au bruit sur leur lieu de travail : 45% affirment que des impacts sur leur comportement et sur la qualité de leur travail sont tout à fait possible (VS 32% et 23% en moyenne), et 34% sur l’équilibre général de leur santé (VS 24% en moyenne).
Les difficultés de compréhension de la parole augmentent chez tous les actifs en poste et le télétravail n’atténue pas ce phénomène
Les actifs en poste estiment de plus en plus que les nuisances sonores sur leur lieu de travail peuvent susciter des difficultés de compréhension de la parole dans des contextes multiples. C’est le cas lors de conversations téléphoniques (50%, +2pts), de réunions de travail (42%, +9pts), de déjeuners collectifs ou séminaires (34%, +5pts) et en cas de perception de signaux d’alerte (27%, +4pts). Les difficultés de compréhension orale lors d’échanges au poste de travail sont le seul cas de figure stable (49% en 2018 ; 48% cette année).Les personnes travaillant dans le BTP et la construction répondent en grande majorité que le bruit sur leur lieu de travail est propice à déclencher des difficultés de compréhension orale dans la plupart des situations évoquées, et plus spécifiquement en cas de conversations téléphoniques (63% VS 50% en moyenne), de réunions de travail (56% VS 42%), de déjeuners entre collègues (48% VS 34%) et de perception des signaux sonores (36% VS 27%). Ces résultats témoignent d’une gêne auditive durable et préoccupante, dans la mesure où elle ne se limite pas à l’emplacement physique du travail.
Là aussi, la pratique du télétravail est intéressante à prendre en compte, les actifs qui télétravaillent étant en moyenne plus nombreux à répondre à l’affirmative quand on leur demande si les nuisances sonores sur leur lieu de travail peuvent compliquer la compréhension de la parole. Cela concerne particulièrement les télétravailleurs réguliers (2 à 3 jours par semaine), qui évoquent surtout des difficultés de compréhension lors d’échanges en face-à-face et numériques : les conversations téléphoniques (61% VS 50% en moyenne), les réunions de travail (57% VS 42%) et les déjeuners collectifs ou séminaires (55% VS 34%).
Une nette majorité de télétravailleurs se déclare affectée par des difficultés auditives depuis la crise sanitaire. Les résultats vont de 66 à 74% pour les différentes dimensions : 74% en échanges collectifs en visioconférence, 73% au téléphone, 71% en échanges individuels en visioconférence et 66% avec leurs proches. Ce dernier chiffre soulève le fait que les difficultés auditives rencontrées depuis le Covid-19 impactent non seulement les communications professionnelles, mais également personnelles, dans le cadre privé. Le lieu de travail étant confondu à l’espace de vie privée, il est logique que la « frontière » du bruit ne s’arrête pas sur le lieu de travail. De surcroît, cette gêne auditive est pour beaucoup répétitive : 40% environ des répondants affirmant éprouver ces difficultés auditives « souvent », notamment lors d’échanges collectifs numériques (40%) et d’échanges téléphoniques (39%).
Les jeunes sont particulièrement impactés par les difficultés de compréhension orale lors d’échanges numériques ou en face à face
Les jeunes sont surreprésentés dans toutes les situations de difficultés de compréhension orale évoquées, et notamment les 18-24 ans, qui sont 85% à avoir rencontré des problèmes auditifs lors d’appels collectifs en visioconférence (VS 74% en moyenne), 94% lors d’échanges au téléphone (VS 73%) et 88% lors d’échanges individuels en visioconférence (VS 71%). Pour eux aussi, les difficultés auditives ne se limitent pas à l’usage des outils numériques et digitaux mais s’étendent aux conversations interpersonnelles : 82% des 18-24 ans témoignent ainsi avoir expérimenté des problèmes de compréhension de la parole avec leurs proches depuis la crise sanitaire (VS 66% dans l’ensemble).
Le télétravail sollicite le système auditif par l’utilisation quotidienne de casques et écouteurs sur une plus ou moins longue durée
Près des deux tiers des personnes (62%) télétravaillant depuis la crise sanitaire utilisent un casque ou des écouteurs dans ce cadre. Or de récentes enquêtes pour la JNA ont montré que l’utilisation d’un casque ne va pas toujours de pair avec un réflexe de protection auditive (comme l’utilisation d’un casque avec réducteur de bruit). Dans le détail, parmi les personnes concernées, 20% l’utilisent moins d’une heure par jour, 22% entre une et deux heures, 13% entre deux et quatre heures et 7% plus de quatre heures. Dans le détail, l’utilisation de casque ou d’écouteurs concerne massivement les jeunes, à hauteur de 74% pour les moins de 35 ans (VS 55% pour les 35 ans et plus). Ce chiffre atteint même 97% pour les 18-24 ans, déjà familiers de ces appareils pour s’isoler du bruit extérieur et écouter de la musique. Il est important de noter que les télétravailleurs réguliers ont plus tendance aussi à enfiler casques ou écouteurs pour travailler de chez eux (75% VS 62% en moyenne), de même que les télétravailleurs avec au moins un enfant au foyer (70% VS 62%).
Parmi les actifs gênés par le bruit sur leur lieu de travail, plus d’un tiers des moins de 35 ans et 45% des télétravailleurs ont consulté pour réaliser un bilan de leur audition
Si la perception d’une gêne auditive causée par le bruit et les nuisances sonores sur le lieu de travail reste importante, elle n’entraîne toujours pas plus de consultations médicales. Seules 15% des personnes gênées par le bruit sur leur lieu de travail ces derniers mois déclarent s’être rendues chez le médecin du travail de leur entreprise ou le service Santé au travail, 14% chez un médecin ORL et 14% chez leur médecin généraliste. Au total, près d’un quart des actifs (28%) percevant une gêne auditive au travail affirment avoir testé leur audition auprès d’au moins un des médecins évoqués, contre 37% en septembre 2019. Cependant, cette chute des consultations est à relativiser dans la mesure où la temporalité est nettement raccourcie par rapport à l’année passée : il s’agit en effet des consultations effectuées au cours des derniers mois, alors que la question de 2019 portait sur les cinq dernières années.
Les jeunes, qui sont plus impactés par les nuisances sonores, sont aussi plus nombreux à avoir consulté un médecin en réaction à celles-ci ; ainsi 36% des moins de 35 ans déclarent avoir réalisé un test de leur audition auprès d’au moins un médecin, contre 24% des 35 ans et plus. De même, les personnes travaillant dans les secteurs du BTP et de l’industrie se sont plus rendues chez un médecin pour des enjeux auditifs, respectivement 37% et 39% d’entre eux (VS 28% en moyenne).
Autre point essentiel de cette étude, les télétravailleurs, eux aussi plus concernés par le bruit et les nuisances sonores sur leur lieu de travail, sont surreprésentés dans les consultations médicales liées à ces problèmes. 45% d’entre eux affirment avoir consulté au moins un médecin au cours des derniers mois : 46% pour ceux qui télétravaillent tout le temps ou la plupart du temps, et 53% pour ceux qui travaillent de chez eux régulièrement (près du double de la moyenne, fixée pour rappel à 28%). Cela signifie que si les télétravailleurs sont davantage impactés par le bruit sur leur lieu de travail, ils ont réagi en conséquence pour préserver leur santé. Par ailleurs, c’est vers les médecins ORL et spécialistes qu’ils semblent se tourner en premier lieu, puisque 28% des personnes qui télétravaillant en ont consulté (VS 25% pour les médecins généralistes et 23% pour les médecins du travail).
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