On le pressentait mais seul le baromètre Ifop-JDD, unique instrument mesurant la popularité de l’exécutif depuis 1958, pouvait l’établir : jamais un président sous la Ve République n’avait connu aussi peu de satisfaits : 20% seulement, soit une chute de 3 points par rapport à octobre (22% pour François Mitterrand en décembre 1991) ; jamais non plus un aussi haut niveau de mécontentement (79%, + 2). Avec 23% de satisfaits (-5), Jean-Marc Ayrault, lui, n’atteint pas encore les résultats record de Raymond Barre (18% en septembre 1976) ou d’Edith Cresson (18% aussi, en juillet 1991).
Si le constat statistique est incontestable, la comparaison demande à être relativisée : de Gaulle et Pompidou avaient été des présidents de croissance avant le premier choc pétrolier ; Giscard, Mitterrand et Chirac, des présidents de l’inquiétude sociale. Sarkozy et Hollande sont des présidents de crise mondialisée, et nous manquons peut-être, pour bien comprendre les chiffres obtenus, d’un baromètre corrigé des variations « crisières ». Forte baisse chez les socialistes.
Il n’en reste pas moins que ce niveau de satisfaction exceptionnellement faible (20% pour l’ensemble de l’opinion) descend même à 15% chez les commerçants et artisans, 17% chez les employés et les ouvriers, et naturellement moins encore chez les sympathisants de droite (3% à l’UMP, 5% au FN). Le recul supplémentaire de ce mois-ci vient des sympathisants écologistes (-11) et socialistes (-11) et des 18-24ans (-11).
L’analyse des explications fournies par les personnes insatisfaites révèle, au-delà de la désespérance sociale, une demande d’autorité de plus en plus nette : très clairement, la gouvernance hollandaise – ce qui, pour ses partisans, pourrait paraître un pilotage en douceur – est perçue par la majorité de l’opinion comme une « indécision», une « impossibilité de décider », un « excès de laxisme» ; le « cas Léonarda », qui fait un retour médiatique étonnant, est spontanément cité par un grand nombre de mécontents. Cette « incapacité de gouverner par rapport aux décisions qu’il prend et qu’il retire par la suite » empêche naturellement de percevoir le cap souvent annoncé. D’où la crainte de l’« ambiance générale de la France, où les gens sont aigris, leur comportement aussi, par exemple la petite fille qui insulte Mme Taubira ». Et l’on retrouve ainsi le problème de la communication présidentielle : en temps de crise, peut-être devrait-elle être plus constante et pédagogique.
partager