En 2002, le numéro de Têtu « Actif Vs Passif Le match de l’été » faisait grand bruit, devenant la plus grosse vente du magazine… Près de quinze ans après, le journal LGBT Garçon Magazine a donc demandé à l’Ifop de mesurer pour la première fois en France la proportion d’hommes se disant actifs ou passifs dans leurs rapports avec les hommes afin de savoir si ce clivage structurait toujours autant les rapports homosexuels.
Publiée dans son numéro spécial Sexe (n°16 – Juillet-Aout 2018), ce premier volet de son « observatoire de la vie sexuelle des hommes qui aiment les hommes » est tiré d’une enquête menée à partir d’un échantillon à la fois représentatif (méthode des quotas) et significatif (848 gays, bisexuels ou hétérosexuels exprimant une attirance sexuelle pour des hommes[1]).
Tendant à briser les idées reçues sur la sexualité gay, cette étude montre que si les relations érotiques entre hommes restent dominées par une polarité de genre arrimée à la division des rôles sexuels – les hommes « réceptifs » étant socialement codés comme féminins, les « actifs » comme masculins -, la « versatilité » est désormais la situation la plus courante chez les hommes qui aiment les hommes.
[1] Enquête menée par questionnaire auto-administré en ligne du 23 mai au 6 juin 2018 auprès d’un échantillon de 848 gays, bisexuels ou hommes assumant actuellement une attirance sexuelle pour des hommes, extrait d’un échantillon global de 12 137 personnes représentatif de la population âgée de 18 ans et plus résidant en France métropolitaine.
Le point de vue de François Kraus de l’Ifop
Symptomatique de l’idéal de sexualité égalitaire et réciproque qui imprègne désormais aussi bien les couples hétérosexuels qu’homosexuels, la grande versatilité observée dans cette enquête remet en cause l’idée selon laquelle la sexualité homosexuelle ne pourrait s’inscrire qu’en suivant un script culturel hétérosexuel. Cette étude prouve qu’entre les deux pôles sexués actif/passif se situent désormais des situations intermédiaires qui nuancent le clivage « pénétrant/pénétré », « dominant/dominé » qui persiste dans les représentations sociales et culturelles associées à la sexualité gay.
Toutefois, même si elles sont sans doute moins figées que dans le passé, ces deux catégories d’identification renvoient toujours à des styles de comportement et de présentation de soi socialement codés comme masculin ou féminin. En cela, la division des rôles sexuels entre hommes ne se limite pas à la chambre à coucher : elle reflète aussi des disparités dans les différents champs de la vie conjugale, en premier lieu desquels la répartition des tâches domestiques perçues comme « féminines ».
Ainsi, même si les couples de même sexe s’inscrivent dans un modèle conjugal plus égalitaire dans la mesure où les deux membres de la dyade amoureuse occupent la même place dans la hiérarchie de genre, leur quotidien conjugal n’échappe pas aux rapports inégalitaires observés dans tous les couples.
François Kraus, responsable du pôle « Genre, sexualités et santé sexuelle de l’Ifop »
CONTACTS :
François KRAUS, responsable de l’expertise « Genre, sexualités et santé sexuelle » à l’Ifop
Pour toute demande de renseignements à propos de cette étude ou pour obtenir des informations quant aux conditions de réalisation d’une enquête similaire, vous pouvez contacter directement François Kraus au 0661003776
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