La grande enquête réalisée par l’Ifop pour Marianne visait, entre autres, à mesurer si l’on pouvait fait apparaître des liens ou des relations entre pratiques sexuelles et orientations politiques. Si bon nombre de pratiques sont généralisées, on observe néanmoins que les personnes qui sont attirées par les extrêmes (personnes ayant l’intention de voter pour le Front de gauche ou le FN aux européennes) déclarent davantage pratiquer la pénétration anale ou les rapports bucco-génitaux, et, qu’à l’inverse, plus on s’approche du centre et de la droite et moins ces pratiques sont répandues. On serait tenté de voir dans ces écarts un simple effet lié à la structure par âge des différents électorats (électorats de la droite et du centre plus âgés). Mais si cet effet joue, il est loin de tout expliquer et à âge égal on retrouve encore ce phénomène. Ainsi par exemple parmi les 35-50 ans, les électeurs UMP déclarent avoir déjà pratiqué la sodomie à 55 % contre 62 % au FN et parmi les plus de 50 ans l’écart entre ces deux électorats est de 10 points : 47 contre 57 %. De la même façon, parmi les plus jeunes (- de 35 ans) la pratique de la pénétration anale varie de 10 points entre électeurs Front de gauche (47 %) et Modem/UDI (37 %).
Assez logiquement, le nombre de partenaires augmente assez linéairement avec l’âge (avec une petite baisse pour les plus de 65 ans dont beaucoup sont nés avant le baby-boom) : une moyenne de 9,9 partenaires s’établissant à 4,6 pour les 18-24 ans, 7,2 pour les 25/34 ans et 12,4 pour les 50/64 ans. Et pour autant, ce ne sont pas dans les électorats les plus âgés que le nombre moyen de partenaires est le plus fort. Là aussi, en dépit (ou même à contrario) de l’âge d’autres logiques prévalent. Les électeurs centristes et de droite semblent un peu plus « stables » sexuellement que les autres comme en témoignent ces chiffres : 11,4 partenaires en moyenne dans l’électorat de Mélenchon et 11 dans celui d’Hollande contre 7,7 chez Bayrou et 9,2 chez Sarkozy mais 10,9 dans l’électorat lepéniste.
Si les électeurs frontistes se caractérisent par des pratiques sexuelles plus fréquentes et plus « extrêmes », des clivages régionaux existent au sein de cet électorat qui ne doit donc pas être considéré comme un bloc homogène. Nous avions déjà montré que les soutiens frontistes du nord de la France présentaient des orientations idéologiques différentes de celles de leurs homologues du Midi sur certains sujets mais la fracture est également sexuelle… Sur toute une série d’indicateurs de notre enquête, on constate en effet que les électeurs frontistes de Paca et Languedoc-Roussillon sont plus adeptes de comportements sexuels «non traditionnels » que ceux « Quart nord » (nous avons regroupé pour l’analyse sous cette appellation les régions : Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Champagne-Ardenne et Haute-Normandie) ou du Grand Est (Alsace, Lorraine, Franche-Comté). C’est le cas notamment pour ce qui est du nombre moyen de partenaires sexuels au cours de sa vie qui s’établit à 10,9 pour l’ensemble de l’électorat FN mais qui grimpe à 14,5 dans le Midi contre 6,5 (soit plus de deux fois moins…) dans le Quart Nord. On retrouve la même fracture sur :
– la pratique régulière de la fellation/cunnilingus : 49 % en moyenne dans l’électorat FN, mais 58 % en Paca/Languedoc Roussillon, contre seulement 45 % dans le Grand Est et 41 % dans le Quart Nord.
– La pratique au moins une fois de la pénétration anale : 57 % en moyenne dans l’électorat FN, mais 65 % en en Paca/Languedoc Roussillon, contre seulement 54 % dans le Grand Est et 52 % dans le Quart Nord.
– Le fait d’avoir déjà trompé son conjoint : 41 % en moyenne dans l’électorat FN, cette pratique étant la moins répandue dans le Grand Est (30 %) et le Quart Nord (34 %) alors qu’une nouvelle fois elle est beaucoup plus courante dans les départements méditerranéens : 47 %.
– Et le fait d’avoir déjà eu un rapport avec une prostituée. En Paca/Languedoc-Roussillon ce comportement est plus de deux fois plus fréquents (24 %) que dans les deux autres ensembles régionaux du Nord et de l’Est qui pointent péniblement à 11 % pour une moyenne dans l’ensemble de l’électorat frontiste de 15 %.
Ces différences ne sont pas anecdotiques, elles renvoient à des attitudes psychologiques, des références culturelles et une conception des rapports hommes/femmes qui sont donc assez différentes dans les électorats frontistes des deux grands bastions de ce mouvement (le littoral méditerranéen et le quart nord-est du pays).
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