A l’occasion du déménagement de l’Etat-major des Armées dans le futur « Pentagone » de Balard prévu 2014 et alors même qu’une vaste phase de transfert des bâtiments historiques appartenant à l’Etat s’opèrent vers les collectivités locales et que la question de leur financement se pose, le cas de l’Hôtel de la Marine a suscité de vives polémiques au sein du monde culturel et politique. Dans ce cadre, l’Etat a lancé un appel à projet au mois de novembre 2010 visant à confier à un opérateur privé l’exploitation et la valorisation des quelques 24 000 m² de ce bâtiment classé monument historique et situé place de la Concorde. Fréquemment cité pour emporter la signature de ce bail de très long terme, le projet porté par le duo Alexandre Allard, réputé pour sa très anticonformiste « Démolition Party » organisée à l’occasion du rachat du Royal Monceau, et Renaud Donnedieu de Vabres, ancien Ministre de la Culture, a été la cible de nombreuses attaques en raison, entre autre, de possibles partenariats avec des mécènes étrangers, qataris notamment.
Si la tribune lancée dans le Monde par de grandes figures intellectuelles françaises pourrait être de prime abord considérée comme une polémique purement académique, le sondage Ifop pour Dimanche Ouest France atteste au contraire de l’adhésion massive des Français. Exprimant un attachement majeur à leur patrimoine architectural, ils sont ainsi 71% à déclarer que l’Etat à tort de vendre l’Hôtel de la Marine à des investisseurs privés, résultat d’autant plus remarquable qu’il s’inscrit dans un contexte où la question de la réduction de la dette et du déficit public préoccupe une large majorité des Français. De fait, la préservation des bâtiments historiques et des symboles du patrimoine culturel de la France prime sur la nécessité, pourtant par ailleurs admise, de réduire la dette.
Un certain nombre d’interviewés sont sans doute peu concernés directement par le cas précis de l’Hôtel de la Marine, d’où l’attention particulière devant être accordée aux scores recueillis auprès des habitants d’Ile-de France : 78% d’entre eux apparaissent opposés à un tel transfert du patrimoine historique vers le privé. Par ailleurs, l’opposition se fait également plus pressente auprès des personnes âgées de plus de 65 ans (77%) tandis qu’à l’inverse les tranches actives, sur lesquelles risquent de peser les efforts les plus importants en matière de réduction de la dette, se montrent plus conciliantes en estimant plus fréquemment que la moyenne que l’Etat a raison de vendre car il doit absolument se désendetter (36% chez les 35-49 ans contre 29% en moyenne). Si les sympathisants socialistes constituent la catégorie la plus critique à l’égard de ce projet (81%), l’expression de réticences reste majoritaire au sein même des interviewés se déclarant proches de l’UMP (61%).
Dans ce contexte, et alors que la date limite des dépôts de candidature court jusqu’au 7 février, l’annonce ce mercredi 2 février du lancement à l’Assemblée nationale d’une mission de contrôle tombe à point pour déterminer « la meilleure utilisation » de ce fleuron du patrimoine architectural français.
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