Le débat sur la dépénalisation du cannabis a été une nouvelle fois relancé par Jean-Marie Le Guen sur BFM TV le 11 avril. Cette prise de position a aussitôt été désapprouvée par le Gouvernement, comme ce fut systématiquement le cas précédemment quand des ministres s’exprimèrent en ce sens : Cécile Duflot en juin 2012, Vincent Peillon en octobre 2012 ou bien encore Christiane Taubira en juillet 2015.
Les arguments avancés sont à chaque fois les mêmes et soulignent l’impasse de la politique de prohibition qui n’a empêché ni la hausse du nombre de consommateurs, ni le développement des réseaux de trafiquants dont l’emprise est manifeste sur certains quartiers. En dépit des arguments évoqués, l’opinion publique apparaissait jusqu’à présent très massivement opposée à cette option. En juin 2012 par exemple, une enquête Ifop pour Atlantico.fr, avait montré que 70% des personnes interrogées étaient opposées à la dépénalisation et que seuls 30% y seraient favorables. Depuis le début des années 2000, ce score restait très stable (entre 32% et 36% de favorables) et on décelait sur une période un peu plus longue un léger mouvement haussier (26% de favorables en 1996).
Dans ce contexte de grande stabilité historique, les résultats du sondage Ifop pour Dimanche Ouest France semblent indiquer un mouvement sensible en faveur de la dépénalisation. 41% des interviewés seraient aujourd’hui favorables à cette option, soit le niveau le plus élevé depuis 1996 et en hausse de 11 points par rapport à 2012. Ce mouvement de hausse, qui s’explique peut-être en partie par la multiplication impressionnante des règlements de compte liés au trafic de drogue, faits venant illustrer l’ampleur qu’a pris cette économie souterraine se développant du fait de la prohibition, s’observe dans toutes les catégories de la population et pas uniquement dans les milieux réputés les plus « ouverts » sur la question. Si la progression atteint 12 points parmi les sympathisants du PS, elle est de 14 points parmi ceux des Républicains et de 17 points dans les rangs du FN. De la même façon, la proportion de personnes favorables à la dépénalisation des drogues douces gagne 10 points chez les moins de 35 ans et 14 points parmi les 65 ans et plus.
En dépit de ces progressions très significatives, des clivages demeurent prégnants sur cette question hautement sensible. Le premier est d’ordre générationnel. 51% des moins de 35 ans sont favorables à un changement de la législation, ce n’est le cas que de 45% des 35-49 ans, de 34% des 50-64 ans et de 31% des 65 ans et plus. La seconde ligne de fracture est politique : 64% des sympathisants du Front de Gauche, 51% de ceux des Verts et 50% du PS se disent favorables à la dépénalisation. A l’inverse, les électeurs de droite sont massivement en faveur du statu quo : 70% parmi les sympathisants de l’UDI et 74% parmi ceux des Républicains.
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