L’Ifop a réalisé pour l’Observatoire de l’éducation de la Fondation Jean-Jaurès une enquête permettant de mieux cerner la place que les enseignants accordent aujourd’hui aux religions à l’école, le sens qu’ils donnent à la laïcité, mais aussi leur point de vue sur le port des signes religieux par les différents acteurs (les élèves, les parents…) du système scolaire.
Retrouvez la note d’analyse de l’enquête de François Kraus publiée sur le site de la Fondation Jean-Jaurès
Le point de vue de François Kraus sur les résultats de l’enquête
Au regard de cette enquête, l’enseignant d’aujourd’hui apparait très éloigné du cliché de l’« hussard noir » qui fut longtemps caricaturé en « laïcard » intransigeant non seulement anticlérical mais aussi anti-religieux. Loin d’être tous habités par un athéisme militant, les enseignants semblent au contraire imprégnés d’une vision très juridique de la laïcité dans laquelle celle-ci est lue avant tout au prisme du cadre fixé par la loi de 1905 : leur rejet d’une conception « antireligieuse » de laïcité transparaissant notamment dans le peu de professeurs qui la voient aujourd’hui comme un outil de lutte contre l’influence des religions dans la société.
Ce regard particulier sur la place des religions dans la société n’empêche pas pour autant le corps enseignant d’exprimer une franche hostilité à l’expression de formes de religiosité au sein du service de l’enseignement. Son soutien (quasi) unanime à l’interdiction des signes religieux ostensibles par les élèves du public, tout comme sa nette opposition aux tenues religieuses portées par les parents bénévoles lors des sorties scolaires, met d’ailleurs en exergue le fossé ayant pu exister depuis 2004 sur ces sujets entre la « masse des profs » et nombre de leurs centrales syndicales. Dans tous les cas, force est de constater que la position de fermeté affichée par Jean-Michel Blanquer depuis des années est loin d’être isolée au sein du corps enseignant même si son adhésion à des mesures d’interdiction tient sans doute au fait qu’elles sont perçues comme des moyens d’assurer l’ordre public scolaire.
Cet attachement des enseignants à une stricte neutralité religieuse dans l’espace scolaire risque toutefois de s’émousser sérieusement avec le temps si l’on en juge par la vision beaucoup plus libérale de la laïcité affichée par les jeunes enseignants. Très en phase avec le relativisme culturel de leur génération sur ces questions, les « jeunes profs » affichent en effet une vision « ouverte » – certains dirons « inclusive » – de la laïcité qui semble très proche des modèles de société anglo-saxonnes multiculturelles. Or, compte-tenu du rôle essentiel des professeurs dans la socialisation des futurs citoyens, cela ne sera pas sans effet sur la conception que les prochaines générations de Français auront de la laïcité et de la place des religions dans la société.
CONTACTS :
François KRAUS, directeur du pôle « Politique / Actualités » de l’Ifop
Pour toute demande de renseignements à propos de cette étude ou pour obtenir des informations quant aux conditions de réalisation d’une enquête similaire, vous pouvez contacter directement François Kraus au 0661003776