Au lendemain de la dixième élection des députés européens, l’Ifop pour La Croix s’est intéressé aux dynamiques et pratiques de vote des électorats confessionnels français au scrutin européen du 9 juin 2024.
Les européennes, on le sait, ont l’habitude de faire l’objet d’une abstention record. Pour autant, et cette tendance semble se confirmer depuis 2019 puisqu’il est reparti à la hausse, le taux de participation (51,5%) à cette élection a dépassé celui de l’abstention (48,5%). On note toutefois une vraie disparité dans les pratiques de vote en fonction de la confession religieuse des électeurs. Certains ont tendance à se mobiliser davantage, c’est le cas des catholiques pratiquants (73% se sont rendus aux urnes, ce chiffre s’élève à 78% chez les pratiquants réguliers), tandis que d’autres sont globalement moins allé voter, à l’instar des musulmans. Ces derniers n’étaient que 41% à se rendre aux urnes, moins que les protestants (57%) et les individus sans confession religieuse (46%).
Grand gagnant de ce scrutin, Jordan Bardella a su fédérer un électorat catholique. Ces derniers sont 37% à avoir exprimé leur soutien au Rassemblement National dans l’isoloir. On note toutefois que les catholiques pratiquants réguliers ne sont que 18% à avoir donné leur voix au président du parti, tandis que les pratiquants occasionnels et les catholiques non-pratiquants sont 40% à l’avoir fait.
Globalement, la majorité présidentielle, dont le score final ne dépasse pas les 14,6%, réunit surtout les voix d’une partie des catholiques. 16% de ces derniers ont accordé leur confiance à la liste conduite par Valérie Hayer, nettement plus que les musulmans (6%) mais surtout nettement moins qu’au précédent scrutin européen (25%).
Grand fait médiatique de cette campagne, le soutien incontesté de La France Insoumise à la Palestine et l’émergence d’une idée de « vote musulman » en faveur de la liste de Manon Aubry semble en effet se confirmer. Là où Jean-Luc Mélenchon et Matthias Tavel affirment que le « vote LFI », c’est la voix de ceux qui ne votent pas ou peu en général (entendre ici les jeunes, les plus précaires, les habitants de quartiers défavorisés et les musulmans), on constate clairement que les musulmans se sont mobilisés en masse (62%) pour la liste Insoumise. De fait, l’importance accordée au conflit israélo-palestinien, relativement mineure à l’échelle de l’ensemble des Français (un électeur sur quatre (25%) considère cet enjeu comme « déterminant »), arrive en première position chez les musulmans, qui l’évoquent à 83%. Cheval de bataille de Manon Aubry et sa liste, la situation au Proche-Orient a donc nettement joué sur la sensibilité des électeurs de confession musulmane. A l’inverse, seulement 4% des catholiques ont glissé un bulletin griffé Aubry dans l’urne.
On note enfin que les sujets déterminants du vote des individus diffèrent en fonction des croyances de ces derniers. Là où la lutte contre le terrorisme est largement plébiscitée par la branche catholique (72%), elle intéresse sensiblement moins les Musulmans (59%), davantage préoccupés par des sujets plus quotidiens tels que le relèvement des salaires et du pouvoir d’achat (76%) la santé (79%), la sécurité et la lutte contre la délinquance (73%). Enfin, la lutte contre le racisme et les discriminations constitue un sujet nettement plus investi par les Musulmans, qui sont 78% à considérer cette thématique comme déterminante de leur vote, contre 39% des Catholiques.
