Dans la perspective de l’élection présidentielle de 2020, le Conseil national des barreaux a souhaité se mobiliser en portant le projet In/Justice. Dans ce cadre, le CNB a missionné l’IFOP pour réaliser une grande enquête d’opinion destinée à mieux cerner les représentations des Français autour des injustices. En voici les principaux enseignements :
Les injustices sont perçues comme étant en augmentation dans la société française
Premier constat de cette enquête, le phénomène des injustices est perçu comme étant en augmentation par 71% des Français contre à l’inverse seulement 7% qui le juge en diminution (et 22% qui estiment qu’elles sont stables).
La notion d’injustices suscite des évocations très différentes d’un sondé à un autre
Alors même que les injustices sont largement perçues comme étant en augmentation, cette notion est en fait diversement appréhendée par les sondés. Nous avons ainsi introduit dans l’enquête une question ouverte dans laquelle nous demandions aux répondants d’indiquer ce à quoi ils rattachaient cette notion. Les verbatim recueillis sont très divers. Si la thématique économique et sociale apparait comme étant la première évoquée, des notions très différentes sont exprimées. Ainsi une partie des sondés fait référence aux inégalités de richesse alors qu’à l’inverse certaines personnes interrogées évoquent l’assistanat. De la même manière, nous avons recueillis des témoignages relatifs aux injustices frappant les personnes issues de l’immigration (discriminations, contrôle au faciès…) alors que d’autres témoignages font référence aux « étrangers qui ont plus de droits que les Français ». Une partie des verbatim recueillis mettent en cause la justice et notamment l’idée selon laquelle elle ne s’appliquerait pas de la même manière pour les faibles et les puissants. L’idée d’une justice trop laxiste est également largement évoquée. Enfin, certains témoignages font également référence aux inégalités entre les hommes et les femmes, mais là encore, un clivage de genre se fait jour.
Les banlieues constituent le territoire le plus associé aux injustices
C’est la France des banlieues qui est avant tout associée aux injustices : 40% citent ainsi ce territoire en premier, loin devant les campagnes (16%), les territoires péri-urbains (13%), les métropoles (11%), les petites villes ou les villes moyennes de province (10%), les territoires enclavés (5%) et les Outre-Mer (5%). Pour autant, alors même que les Français associent les banlieues aux injustices, la question des contrôles au faciès suscite une indignation significativement moindre que d’autres problématiques. Nous avons ainsi énoncé une liste de situations et nous avons demandé aux sondés d’y attribuer une note entre 1 et 20 pour qualifier le niveau d’injustice perçu. La situation d’une personne subissant ainsi de nombreux contrôles au faciès obtient une note moyenne de 13,5/20, ce qui la classe seulement en 9e position des injustices perçues, loin derrière l’exposition d’un enfant à du harcèlement scolaire (17/20), l’occupation d’un appartement par des squatteurs (16,6/20) ou l’inégalité de rémunération entre un homme et une femme occupant un poste équivalent (16,2/10). En fait, la question du contrôle au faciès apparait comme particulièrement clivante, notamment quand on analyse les résultats à l’aune de la proximité politique. Les sympathisants de gauche jugent cette situation particulièrement injuste (15,7/20) alors qu’à l’inverse, les Français proches de LR (11,1/20) et du RN (11/20) sont significativement moins nombreux à s’en émouvoir.