A l’occasion de la Journée mondiale de la Malbouffe qui vise à rappeler chaque année les effets néfastes que la « junk food » peut avoir sur la santé, le site d’information Naturasanté a commandé à l’Ifop une enquête sur la consommation de nourriture trop grasse, trop sucrée ou trop riche. Réalisée auprès d’un échantillon national représentatif de 1 000 personnes, cette étude montre entre autres que si les Français sont peu nombreux à résister aux charmes de la malbouffe, celle-ci suscite souvent un sentiment de honte – notamment chez les femmes – au point que certains en viennent même à en dissimuler la consommation à leurs proches.
1) RARES SONT LES FRANÇAIS A RESISTER AUX CHARMES DE LA MALBOUFFE
La quasi-totalité des Français admettent se laisser aller régulièrement ou occasionnellement à manger des produits pourtant jugés néfastes sur le plan diététique comme les chocolats (99%), les glaces (98%), les frites (97%) ou les pizzas (96%). Symbole par excellence de la malbouffe importée des Etats-Unis, le hamburger reste quant à lui un produit de consommation courante pour 85% des Français, sachant que s’il a su se renouveler et quitter l’univers déclassé et populaire des fastfoods, il n’en reste pas moins un produit tiré par les jeunes. Malgré le feu de critiques essuyé depuis des années en raison de leur impact sur la santé et l’environnement, les pâtes à tartiner comme le Nutella ne sont pas pour autant boudées par les Français : plus des trois quarts d’entre eux (78%) en mangent régulièrement ou occasionnellement. In fine, de tous les produits associés à la malbouffe, ce sont les kebabs qui sont les moins consommés par les Français (28% d’entre eux n’en mangent jamais), sans doute parce qu’en plus d’être hyper caloriques, ils ne sont pas toujours rassurants en ce qui concerne le respect des normes sanitaires.
2) LA MALBOUFFE : UNE CONSOMMATION AVANT TOUT CORRÉLÉE AU PLAISIR QU’ELLE SUSCITE Cette étude montre aussi que le succès de la malbouffe ne repose pas que sur le côté pratique ou bon marché qui peut être associé à certains de ses symboles (ex : hamburger) : la consommation de ces produits souvent chargés de substances très addictives (ex : sucre, sel, graisse…) apparaissant très corrélée au plaisir qu’elle procure dans le cerveau humain. C’est particulièrement net en ce qui concerne les chocolats (53% des Français déclarent avoir « beaucoup » de plaisir en les mangeant) ou les glaces (47%) dont la dégustation s’inscrit souvent dans des petits moments de « plaisir » encore légitimes socialement malgré leur fort apport en sucre. Mais c’est aussi le cas pour des plats beaucoup plus critiqués comme les frites (38 %) ou les pizzas (37 %) qui suscitent un fort taux de satisfaction culinaire malgré leur apport en graisse. Seule exception à la règle : les plats préparés, surgelés ou en conserve qui constituent l’aliment de type « malbouffe » qui suscite le moins de plaisir (5 %) mais pas le moins de consommation (83 %), confirmant par-là l’idée selon laquelle leur succès repose plus sur leur côté pratique que sur leur qualité gustative.
3) MALBOUFFE ET PLAISIR : UN CONTENTEMENT PLUS FORTEMENT RESSENTI CHEZ LES FEMMES QUE CHEZ LES HOMMES Une des autres surprises de l’enquête est qu’elle montre que les femmes semblent ressentir plus de plaisir que les hommes lorsqu’elles s’abandonnent à ce genre de mets, sans doute parce qu’il s’agit pour elles d’une expérience à la fois plus rare et plus transgressive au regard des normes de minceur qui pèsent toujours beaucoup plus sur la gent féminine que masculine. L’écart de plaisir entre les deux sexes ressenti lors de la dégustation de ce genre d’aliments est particulièrement frappant en ce qui concerne des produits très sucrés comme le Nutella (10 points de plus chez les femmes que chez les hommes), les chocolats (à 57% chez les femmes contre 48% chez les hommes), les glaces (50% contre 44%) ou les bonbons (24% contre 17%). Mais cet écart ressort aussi dans la dégustation de produits forts en sel et en gras comme les frites, les hamburgers ou les chips, sans doute parce que celle-ci constitue pour elles une forme de lâcher-prise d’autant plus jouissive que les femmes sont plus soumises aux injonctions sociales en matière de contrôle de soi et de son alimentation.
4) JUNK FOOD ET CULPABILITÉ : UN SENTIMENT DE HONTE PLUS FORT CHEZ LES FEMMES QUE CHEZ LES HOMMES Ainsi, dans une société où elles sont plus soumises aux normes corporelles et à son corollaire – la pression au « manger sain et équilibré » -, les femmes se sentent généralement plus coupables (52 %) que les hommes (47 %) après avoir mangé un produit associé à la malbouffe (ex : pâte à tartiner, sucreries, hamburger, frites…).
Et ce sentiment de culpabilité lié à la transgression des normes alimentaires est particulièrement fort dans les rangs des femmes où le respect des normes de minceur et l’importance de l’esthétique est particulièrement valorisée dans les médias et les discours quotidiens. En effet, il affecte plus fortement les jeunes femmes (61 % des moins de 25 ans, 70 % des étudiantes) et les cadres (66 % à ressentir de la honte, contre 49 % des employées et ouvrières), deux catégories de la population particulièrement exposées aux discours sur le « manger sain » et aux informations sur les risques que fait encourir la malbouffe sur le plan diététique.
5) UNE CULPABILITÉ ALIMENTAIRE PARTICULIÈREMENT RÉPANDUE DANS LES RÉGIONS TOUCHÉES PAR L’OBÉSITÉ Toutes les régions de France ne sont pas affectées de la même manière par le sentiment de culpabilité que peut provoquer la consommation de produits associés à la malbouffe. Les résultats l’enquête montrent en effet que ce sentiment est particulièrement fort dans les régions où le nombre de victimes d’une alimentation déséquilibrée est le plus élevé, à savoir le quart Nord-Est de la France. C’est particulièrement net dans les régions où la proportion d’obèses est largement supérieure (+5 points) à la moyenne nationale (ex : Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Champagne Ardennes) : le sentiment de honte lié à la malbouffe atteignant ainsi des sommets dans les Hauts-de-France (55%) et le Grand Est (54%). A l’inverse, il est particulièrement faible en Occitanie (43%), région où on observe le taux d’obésité le plus bas de France (11,6% en Midi-Pyrénées).
6) MANGER DU NUTELLA, LE SUMMUM DE LA HONTE ? De même, tous les produits associés à la malbouffe ne suscitent pas le même niveau de culpabilité. Et parmi ceux qui suscitent le plus de honte, il est intéressant de noter que ce sont les pâtes à tartiner qui génèrent le sentiment de culpabilité à la fois le plus fréquent (15% ont « souvent » honte en en mangeant) et le plus répandu (38%). Cet élément s’explique sans doute par l’image négative de la marque de pâte à tartiner la plus connue (Nutella), décriée depuis des années à la fois pour son impact sur la santé (environ 50% de teneur en sucre) et sur l’environnement (environ 20% d’huile de palme). Par ailleurs, suite aux « émeutes du Nutella » survenues en janvier dans plusieurs supermarchés de communes populaires, il est possible que la consommation de cet aliment soit désormais associée à un comportement alimentaire typique des milieux défavorisés incapables de s’affranchir du discours des marques de produits industriels. Le fait que ce sentiment de honte soit beaucoup plus élevé chez les cadres (53%) et les chefs d’entreprise (47%) que chez les CSP – (36%) ou chez les chômeurs (30%) tendrait ainsi à montrer qu’en admettre sa consommation expose désormais à un risque de « stigmate social ».
7) UN FRANÇAIS SUR CINQ A MÊME DÉJÀ DISSIMULÉ SON GOÛT POUR LA MALBOUFFE Cette culpabilité liée à des choix alimentaires transgressant les normes « d’alimentation saine et équilibrée » se traduit même par des comportements de dissimulation : plus d’un Français sur cinq (22%) admettant avoir déjà dissimulé à ses proches sa consommation de produits de type malbouffe. Et cette dissimulation affecte particulièrement la consommation de sucreries (18% des Français l’ont déjà caché à leurs proches), en particulier chez les jeunes (30% des moins de 25 ans, 37% des étudiants) qui peuvent sans doute ne pas vouloir assumer le caractère régressif et enfantin associés aux bonbons.
À PROPOS DE L’ÉTUDE : Étude Ifop pour Naturasante.fr réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 11 au 12 juillet 2018 auprès d’un échantillon de 1 030 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus CONTACTS : François KRAUS, responsable de l’expertise « Genre, sexualités et santé sexuelle » à l’Ifop Pour toute demande de renseignements à propos de cette étude ou pour obtenir des informations quant aux conditions de réalisation d’une enquête similaire, vous pouvez contacter directement François Kraus au 0661003776 |
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