Alors que la campagne de vaccination s’accélère en France, la majorité des Français souhaite se faire vacciner : c’est le cas de 54%, soit trois points de plus que la première de janvier et surtout quinze point de plus qu’en décembre. Cette « décrispation vaccinale » amorcée après un premier temps d’expectative (pendant lequel les premières injections ont montré leur innocuité et la mise en œuvre de la campagne de vaccination fait craindre un manque de doses), et qui semble vouée à se poursuivre, ne touche cependant pas toute la population de manière homogène. Comme cela a pu être observé précédemment, des poches de « vaccinosceptiques » demeurent, notamment chez les femmes, les jeunes, les catégories populaires et les publics défiants à l’égard des institutions (dont les sympathisants du Rassemblement National – éléments précisés ci-après).
S’agissant de « l’après » campagne de vaccination et de la perspective d’un « passeport vaccinal », 62% des Français se prononcent en faveur de la vaccination obligatoire chez les personnes souhaitant prendre l’avion pour se rendre à l’étranger – un « passeport vaccinal » que les professionnels du tourisme estiment qu’il sera institué de facto en raison des conditions draconiennes de départ et d’arrivée dans de nombreux pays. Par ailleurs, 60% des Français sont pour que seules les personnes vaccinées contre le Covid-19 soient autorisées à rendre visite aux personnes vulnérables en maisons de retraite ou à l’hôpital.
Pour des pratiques plus fréquentes au quotidien, le principe de « passeport vaccinal » semble couper la France en deux. En effet, environ la moitié des Français se prononcent en faveur d’une obligation de vaccination faite à tous les usagers des transports en commun (52%), aux élèves et personnels des collèges et lycées (50%), aux spectateurs des cinémas et salles de spectacle (50%) ainsi qu’aux salariés souhaitant exercer leur activité sur leur lieu de travail habituel (50%). Seule activité pour laquelle une minorité des Français adhère à l’obligation vaccinale : la fréquentation des commerces (45%), ceux-ci pouvant déjà recevoir du public… sans vaccin.
Dans le détail, on observe plusieurs facteurs déterminants dans l’adhésion aux différentes déclinaisons du passeport vaccinal, au premier rang desquels l’âge. Comme dans les enquêtes relatives au souhait de se faire vacciner contre le Covid-19, les plus jeunes figurent parmi les plus réticents à l’idée d’imposer la vaccination dans plusieurs contextes, alors que les plus âgés en sont les premiers défenseurs (chez les 65 ans et plus : 62% à 78% d’adhésion aux différentes modalités testées).
Le sexe joue lui aussi puisque les femmes affichent des taux d’adhésion nettement inférieurs à ceux des hommes, la gent féminine étant encore bien souvent assignée aux tâches relatives à la santé du sein du foyer (et sont enjointes à adopter une posture de précaution à ce sujet). Au regard de la catégorie socioprofessionnelle, les CSP- se révèlent moins favorables que la moyenne à la vaccination obligatoire… de même que les cadres, preuve que la circonspection à l’égard de la vaccination obligatoire dépasse les clivages de niveau de vie ou de diplôme. Vis-à-vis de la proximité politique, et dans le prolongement des études les plus récentes, les sympathisants du Rassemblement National apparaissent encore une fois parmi les plus rétifs à l’idée d’un passeport vaccinal ; certains pourront en outre s’étonner de voir que les proches d’Europe Ecologie Les Verts n’adoptent pas une posture « vaccinosceptique » (contrairement à certains élus du parti), ils sont même majoritairement favorables à chacun des items testés.
Enfin, deux facteurs plus contextuels jouent un rôle déterminant dans l’appréciation du « passeport vaccinal » par les Français : leur confiance dans les institutions et, plus largement, dans la science. Ainsi, selon que les répondants déclarent faire confiance ou pas au Conseil scientifique, ou encore au ministre de la Santé Olivier Véran, ils sont soit majoritairement favorables à toutes les déclinaisons de l’obligation vaccinale ou, au contraire, opposés à toutes. Parallèlement, les Français estimant que la science apporte plus de bien que de mal à l’homme ont tendance à se ranger au principe du passeport vaccinal, alors que ceux qui redoutent la science s’y montrent opposés.