La fraternité : un idéal partagé face aux défis du réel
L’édition 2025 du baromètre de la Fraternité révèle une société française traversée par des dynamiques paradoxales. Si 83% des Français reconnaissent l’utilité de la fraternité aujourd’hui, seuls 12% la placent comme première valeur de la République, loin derrière la liberté (65%) et l’égalité (23%). Ce décalage entre l’adhésion théorique et la priorisation pratique illustre les tensions qui caractérisent notre rapport à cette valeur fondamentale.
Les Français, conscients des carences de la France en matière de fraternité
La perception de la fraternité en France révèle un constat préoccupant : seulement la moitié des Français considèrent leur pays comme véritablement fraternel. Ce diagnostic sévère se reflète particulièrement dans l’évaluation des interactions sociales, puisque moins d’un Français sur deux (47%) estime que ses concitoyens sont capables de dialoguer ensemble, tandis qu’une proportion encore plus faible (43%) juge que la société facilite l’établissement de relations de confiance. Cette situation n’échappe pas aux Français eux-mêmes, qui sont près des deux tiers (63%) à considérer que la fraternité est une valeur sous-estimée dans notre société. Ces chiffres dessinent le portrait d’une nation consciente de ses carences en matière de fraternité.
Les Français, conscients de l’importance de la fraternité et des liens sociaux
Les Français témoignent d’une réelle conscience des bénéfices que pourrait apporter un renforcement de la fraternité dans leur société. Cette conviction se manifeste notamment à travers leur perception du lien entre fraternité et sécurité : près des trois quarts d’entre eux (72%) estiment qu’une augmentation des actions fraternelles contribuerait à renforcer leur sentiment de sécurité. Cette reconnaissance de l’importance de la fraternité se traduit également dans le domaine du bien-être personnel, puisqu’une large majorité de Français (83%) reconnaît l’impact positif des liens fraternels sur la santé mentale.
Une fraternité de proximité : le repli sur les cercles proches face à la méfiance généralisée
Dans un contexte de méfiance historiquement élevée où 77% des Français estiment qu’on n’est jamais assez prudent avec les autres (contre 62% en 2019), on observe un net repli sur les cercles de proximité. Ainsi, 52% des Français privilégient l’aide aux personnes qu’ils connaissent, tandis que seulement 30% étendent ce devoir aux inconnus. Cette tendance se reflète dans les préoccupations quotidiennes, dominées par la préservation de l’harmonie familiale (31%) et la protection contre les agressions et incivilités (31%). Ces données témoignent d’une société fragmentée où la fraternité se limite de plus en plus au cercle proche.
La diversité en France : une réalité quotidienne et un rapport ambivalent
La France se caractérise par une diversité largement reconnue et vécue au quotidien : 84% des Français considèrent leur pays comme un pays de diversité, et cette mixité se traduit concrètement dans les interactions sociales. Ainsi, une majorité de Français déclare collaborer régulièrement avec des personnes de générations différentes (73%), de milieux sociaux différents (70%), et de couleurs de peau différentes (65%), notamment dans le cadre professionnel.
Cependant, cette diversité génère des sentiments ambivalents : si elle structure le quotidien, elle est simultanément perçue par 72% des Français comme source de problèmes et de conflits. Cette ambivalence se cristallise particulièrement autour de la question migratoire : 45% des Français identifient les tensions liées aux différences culturelles et à l’immigration comme le premier domaine nécessitant un renforcement de la coopération, devant les inégalités sociales (40%) et les incompréhensions intergénérationnelles (26%).
Le respect, entre fraternité et attente d’autorité
En creux, l’attachement des Français à la fraternité semble étroitement lié à une attente forte de respect, voire d’autorité. Lorsqu’on leur demande ce que signifie faire preuve de fraternité, ils citent en premier le fait de traiter tous les individus avec respect (38 % en premier, 59 % au total). De même, 46 % estiment que la première valeur à transmettre aux jeunes générations est le respect, loin devant la tolérance (14 %). Ce besoin de respect traduit à la fois une aspiration à des relations apaisées et une attente d’un cadre structurant, dans un contexte où la société semble manquer de repères partagés.