L’étude réalisée par l’Ifop pour le CIC offre un éclairage précieux sur la situation des actifs qui ne sont pas en CDI en France, particulièrement en ce qui concerne leur accès au crédit et à la propriété. Cette enquête, menée auprès de deux échantillons représentatifs – l’un composé de 1003 actifs hors CDI et l’autre de 1001 salariés en CDI – permet de brosser un portrait nuancé de cette population diverse et de mettre en lumière les défis auxquels elle est confrontée en matière d’accès au crédit immobilier.
L’étude révèle des différences significatives dans la satisfaction professionnelle selon les statuts. Les indépendants, par exemple, sont globalement plus satisfaits de leur situation que les CDD et intérimaires. Une majorité d’entre eux exprime un sentiment de liberté, et moins d’un sur cinq souhaiterait obtenir un CDI. Cette satisfaction s’explique en partie par l’autonomie accrue dont ils bénéficient, citée comme un avantage par 47% des actifs hors CDI, ainsi que par un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, mentionné par 42% d’entre eux. À l’inverse, le statut semble plus souvent subi pour les travailleurs en CDD. Ces chiffres mettent en lumière une dichotomie importante au sein de la population active hors CDI, entre ceux qui choisissent ce statut pour sa flexibilité et ceux qui le subissent faute d’alternatives plus stables.
Malgré ces avantages perçus, l’instabilité des revenus demeure un inconvénient majeur, cité par 51% des actifs hors CDI. Cette instabilité concerne près d’un actif sur deux qui n’est pas en CDI (46%), contre seulement 19% des salariés en CDI. L’étude montre que cette précarité financière entraîne des répercussions concrètes sur le quotidien de ces actifs. Pour faire face à cette situation, 68% des actifs hors CDI déclarent limiter leurs dépenses, tandis que 32% constituent une épargne de précaution. Ces stratégies d’adaptation témoignent d’une gestion financière plus contrainte et potentiellement stressante pour une part importante de cette population.
L’impact de cette instabilité financière se fait particulièrement sentir dans l’accès à la propriété. L’étude révèle un écart significatif entre les actifs hors CDI et ceux en CDI : seulement 45% des actifs hors CDI sont propriétaires, contre 60% des salariés en CDI. Bien que cette différence puisse s’expliquer en partie par l’âge des répondants (les CDD et intérimaires étant souvent plus jeunes), elle reflète surtout les difficultés auxquelles sont confrontés les actifs hors CDI pour l’accès au crédit.
L’aspiration à l’accession à la propriété est pourtant largement partagée, avec 70% des actifs hors CDI et 78% des salariés en CDI qui ont envisagé d’acheter un bien immobilier. Cependant, on observe un mécanisme d’autocensure beaucoup plus important chez les actifs hors CDI en ce qui concerne les demandes de crédit. Seulement 42% d’entre eux ont déjà formulé une telle demande, contre 60% des salariés en CDI. Cette autocensure est particulièrement marquée chez les salariés en CDD (36% ont formulé une demande) et les intérimaires (35%).
La principale raison de cette autocensure est claire : 71% des personnes qui ont envisagé d’acheter un logement mais n’ont pas fait de demande citent le fait de ne pas être en CDI comme un facteur déterminant. Ce chiffre élevé suggère une perception largement répandue parmi les actifs hors CDI que leur statut constitue un obstacle majeur à l’obtention d’un crédit immobilier. De plus, lorsqu’ils franchissent le pas et font une demande, les actifs hors CDI font face à des échecs plus fréquents. L’étude montre que 36% des demandes de crédit des actifs hors CDI se soldent par un échec, contre seulement 25% pour les salariés en CDI. Ce taux d’échec plus élevé confirme les craintes de cette population et renforce probablement le phénomène d’autocensure observé. Pour 85% de ceux qui ont rencontré des difficultés, le fait de ne pas être en CDI a été identifié comme un facteur déterminant dans l’échec de leur demande.
Cette situation crée un sentiment de discrimination largement répandu : 82% des actifs hors CDI ont le sentiment d’être désavantagés par rapport aux actifs en CDI pour l’obtention d’un crédit. Ce sentiment de désavantage, couplé aux expériences réelles de refus, peut entraîner des conséquences importantes sur les démarches et les projets de vie de cette population, conduisant potentiellement à un renoncement à long terme à l’accession à la propriété. Face à ces difficultés, l’étude révèle un fort intérêt pour des solutions adaptées. L’idée d’un crédit immobilier spécialement conçu pour les personnes qui ne sont pas en CDI suscite l’intérêt de 75% des actifs hors CDI. Ce chiffre élevé souligne le besoin non satisfait par les offres bancaires actuelles et suggère la nécessité pour les institutions financières de repenser leurs critères d’évaluation des risques et d’adapter leurs produits à l’évolution du marché du travail.