A l’occasion de la 4e édition du baromètre de L’Autre Cercle, l’Ifop a réalisé une enquête d’une ampleur inégalée, auprès du plus large échantillon représentatif d’employé·es LGBT+ jamais sondé, doublé d’une consultation d’envergure auprès d’employé·es des organisations signataires de la Charte d’Engagement LGBT+. Grâce au fonds Recherche & Développement de l’Ifop, et pour la 1e fois, une enquête prend le pouls d’un échantillon national représentatif de plus de 1000 LGBT+. Ce panel d’une envergure inégalée jusqu’à aujourd’hui nous permet d’avoir une photographie fine des réalités sur le terrain.
Une France de plus en plus ouverte aux questions LGBT+ au travail
Globalement, le climat au travail autour des sujets liés à l’orientation sexuelle ou l’identité de genre n’a jamais été aussi progressiste qu’aujourd’hui. Ainsi, près de 9 Français·es employé·es sur 10 sont favorables à l’accès aux droits parentaux pour leurs collègues ayant eu un enfant via une GPA, même s’ils / elles / iels n’en sont pas le parent biologique. Une dynamique qui se traduit également par un fort taux d’adhésion autour des questions liées à la féminisation des noms de métiers (76%) ou à l’accès aux toilettes pour les personnes transgenres ou non-binaires selon le genre auquel ils / elles / iels s’identifient (74%). Indicateur supplémentaire de cette normalisation : deux tiers légitiment l’usage des termes neutres (ex : « droits humains » plutôt que « droits de l’homme ») ou encore de l’écriture inclusive. Plus délicat cependant, l’usage des pronoms de genre dans les signatures d’e-mails ou les cartes de visite : près de 4 Français·es employé·es sur 10 (38%) y sont encore défavorables. Un chiffre qui pourrait peut-être s’expliquer par une perception biaisée d’un acte qui serait compris comme militant.
Cette évolution des mentalités profite à la visibilité des personnes LGBT+ qui augmente de 10 points en 6 ans. Ainsi, aujourd’hui plus de 6 personnes LGBT+ sur 10 (60% vs 50% en 2018) déclarent être visibles auprès de leurs collègues, et seulement 1 sur 2 auprès de leurs supérieur·es hiérarchiques direct·es (49%).
En miroir à ces enseignements, les actes de violences physiques diminuent de 4 points par rapport à 2021, passant de 14% à 10%, et les discriminations LGBTphobes dans la rémunération ou dans le recrutement reculent elles de deux points, pour atteindre respectivement 16% et 15% des Français·es employé·es LGBT+.
Les employé·es transgenres et non-binaires, en première ligne des LGBTphobies
Une évolution positive qui peut toutefois être nuancée car des zones d’ombre persistent. Ainsi, près de 3 Français·es employé·es LGBT+ sur 10 (28%) déclarent encore aujourd’hui avoir été victimes d’au moins une agression LGBTphobe au travail : un niveau qui reste élevé depuis plusieurs années. En outre, ils / elles / iels sont plus de la moitié (53%) à déclarer avoir entendu des expressions LGBTphobes telles que « enculé » (45%), « gouine » (32%) ou encore « travelo » (29%). Enfin, le silence reste encore très prégnant : près de 4 Français·es employé·es LGBT+ sur 10 (39%) victimes de moqueries désobligeantes ou de propos vexants n’en ont parlé à personne.
Ces résultats sont significatifs des défis qui perdurent, notamment pour les personnes transgenres et non-binaires pour qui les LGBTphobies sont exacerbées. Ainsi, ils / elles / iels sont près de 35% (vs 21% des Français·es employé·es LGBT+) à déclarer avoir constaté des traitements inégaux du fait de leur orientation sexuelle ou de leur identité ou expression de genre, notamment dans le déroulement de leur carrière (34% vs 20%). Ils / elles / iels sont par ailleurs plus d’un tiers (37%) à avoir subi au moins une agression sur le lieu de travail, un résultat supérieur de 9 points à celui des Français·es employé·es LGBT+.
Une tendance qui se confirme avec la réaction de malaise déclarée face au coming out d’un·e collègue LGBT+ au travail. Si les Français·es employé·es non-LGBT+ se déclarent « mal à l’aise » en cas de coming out d’un·e collègue gay, bisexuel·le ou lesbienne dans une relative faible proportion (moins de 6%), ce chiffre grimpe à 21% et 16% en ce qui concerne les collègues transgenres et non-binaires.
Un contexte non inclusif qui les pousse à renoncer plus que la moyenne des Français·es employé·es LGBT+ à indiquer le nom de leur conjoint·e sur leur mutuelle (46% vs 23%) ou encore à participer à un événement organisé par l’employeur où les conjoint·es sont invité·es (44% vs 28%).
L’engagement, moteur de politiques d’inclusion efficientes
Si les enseignements tirés du 4e baromètre mettent en lumière l’évolution des mentalités qui imprègne aujourd’hui l’ensemble du monde du travail français, ils soulignent également l’importance de l’engagement comme levier de politique d’inclusion efficace. En ce sens, les organisations signataires de la Charte d’Engagement LGBT+ de L’Autre Cercle font figure de bons élèves.
Les salarié·es ou agent·es sont ainsi plus nombreux·ses à considérer leur organisation comme LGBT Friendly dès lors qu’ils / elles / iels travaillent dans une organisation signataire de la Charte d’Engagement LGBT+ de L’Autre Cercle (93% contre 77% pour l’ensemble des Français·es employé·es).
Les personnes LGBT+ y sont aussi plus visibles auprès d’au moins un membre de leur environnement professionnel (71% vs 64%) et moins nombreux à être victimes d’insultes ou d’injures à caractère diffamatoire (9% vs 16%) et d’actes de violences physiques ou sexuelles (3% vs 10%).
Si nous nous réjouissons de constater que notre combat en faveur d’une meilleure inclusion des personnes LGBT+ au travail commence à porter ses fruits, les discriminations perdurent. La question des Transidentités et des Non-Binarités est aujourd’hui attaquée. C’est pourquoi nous travaillons actuellement à la rédaction du guide à destination des employeurs sur les Transidentités et les Non-Binarités dont la publication est prévue à l’automne prochain. », déclare L’Autre Cercle.
Le point de vue de François Kraus sur l’étude
L’amélioration de la visibilité LGBT au travail s’inscrit dans un contexte « post-Metoo » marqué par une évolution rapide des mentalités sur les questions relative à l’homosexualité ou à l’identité de genre.
Cette acceptation sociale croissante de l’homosexualité est, certes, inhérente aux sociétés industrielles avancées affectées par la progression des valeurs « post-matérialistes ». Mais l’évolution récente de la législation a pu aussi accélérer cette transformation des attitudes à l’égard des LGBT car tout comme l’officialisation des couples homosexuels par les lois de 1999 (PACS) et de 2013 (Mariage pour Tous) avait fait évoluer spectaculairement l’opinion sur ces sujets, la loi élargissant l’accès à la PMA a favorisé une reconnaissance accrue des modèles sortant de la « norme » hétéro-cisgenre, l’évolution rapide du positionnement des Français sur la GPA en étant le dernier exemple.
Enfin, à l’heure où la nomination d’un Premier ministre ouvertement gay (janvier 2024) ne fait plus l’objet de débats, on a le sentiment d’une certaine décrispation de l’opinion sur ces sujets qui, dans la société en général comme du monde du travail, ne peut que faciliter une plus grande visibilité des populations LGBT.