Constance Rivière, Directrice générale du Palais de la Porte Dorée, partage les défis et les principaux enseignements de l’étude exclusive réalisée par Occurrence, à l’occasion de l’ouverture du nouveau Musée de l’histoire de l’immigration.
1. Pourquoi avoir choisi de sonder les “Français sur l’immigration” à cette occasion ?
Il y a un grand paradoxe : l’immigration est en France souvent évoquée, et elle est en même temps mal connue. Pour le dire vite, on en parle, mais on en parle mal. Objet de peur, de débats, souvent de polémiques, elle est rarement posée comme ce qu’elle est pourtant, une part constitutive de notre histoire commune.
Pour la nouvelle exposition permanente du Musée national de l’histoire de l’immigration, nous avons fait le choix du temps long, de la chronologie, et de parcours à la fois très riches et artistiques, avec 80% d’œuvres inédites, mais aussi très pédagogiques pour contribuer à améliorer la connaissance de cette histoire, qui éclaire évidemment notre présent.
C’est dans cette perspective qu’à l’occasion de son ouverture au grand public, nous avons souhaité interroger les Français autrement sur leur rapport à l’immigration, à travers des questions inédites.
Nous voulions comprendre quels regards ils portent sur ce sujet mais aussi mieux cerner leurs connaissances objectives et leur lien intime avec des personnes immigrées ou issues de l’immigration. Quelles connaissances ont nos concitoyens de la réalité de l’immigration en France aujourd’hui ? Quelle perception en ont-ils si on replace les migrations dans un contexte historique ou personnel ? Y a-t-il enfin une corrélation entre connaissance et perception sur ce sujet considéré comme sensible ?
Pour en avoir le cœur net, nous avons sollicité Occurrence (Groupe Ifop) qui nous a proposé cette étude exclusive dont nous avons dévoilé les résultats la semaine précédant l’ouverture du nouveau Musée.
2. Quels chiffres retenez-vous ?
Le sondage montre que les Français se considèrent globalement mal informés sur l’immigration et que les conditions d’un débat serein ne sont pas réunies. Sur le volet connaissance, sur 1000 personnes interrogées, un seul individu avait la bonne réponse aux six questions de connaissance qui étaient posées.
Plus important encore, l’étude montre que plus la connaissance est faible (voire erronée) et plus les opinions sont en défaveur de l’immigration. A l’affirmation « Il y a trop d’immigrés en France », 62% des Français répondent « oui » mais le « oui » atteint 73% pour les Français qui se trompent sur les six questions de connaissance. A l’affirmation « L’immigration est une chance pour la France » : oui pour 47% des Français, mais uniquement 32% pour ceux qui se trompent sur les six questions de connaissance. Et enfin à l’affirmation « L’Histoire de la France s’est construite en partie grâce à l’immigration » : 66% des Français approuvent, mais uniquement 55% pour ceux qui se trompent sur les six questions de connaissance.
Autre point très important : le sondage montre que lorsque l’on dépasse ses propres préjugés ou que l’on est au contact d’immigrés dans son cercle intime (famille, ami, collègue), l’immigration est perçue plus positivement, la discussion gagne en sérénité et tous les sujets peuvent être abordés.
C’est bien l’une de nos missions : refroidir les sujets chauds en donnant des éléments sourcés, chiffrés, vérifiés, pour apaiser le débat en repartant des faits ; et réchauffer les sujets froids lorsque certains faits, notamment historiques, semblent oubliés ou ignorés de notre récit national.
3. Dans quelle mesure les résultats de cette étude peuvent orienter votre action ?
Est-ce qu’une étude peut soigner, repriser, réparer … ? Probablement pas. Mais en proposant une image fiable et équilibrée des perceptions des Français, elle permet d’identifier les communs possibles en France, elle ouvre un chemin de connaissance, et donc d’espoir. L’étude montre en effet que seuls 15% des sondés sont réfractaires à l’immigration sur l’ensemble des personnes sondées. Cela signifie que 85% sont désireux de connaître mieux et d’aborder cette question, constitutive de la vie de notre pays, avec sérénité. Je rappelle un autre chiffre, qui n’est pas dans cette étude mais qui montre à quel point l’immigration est une histoire française : aujourd’hui 1 Français sur 3 est issu de l’immigration sur trois générations.
Plus généralement, l’étude conforte notre action, car elle souligne le rôle essentiel de notre institution : faire connaitre l’histoire de l’immigration au plus grand nombre, apporter des chiffres et des données objectives, dépassionner les débats.
Et elle nous permettra aussi de mesurer notre action : les questions de connaissance du sondage national seront posées à nos visiteurs après leur visite du musée. Nous verrons ainsi dans quelle mesure l’exposition contribue effectivement à faire progresser la connaissance et à porter un autre regard sur l’immigration !
Pour plus d’informations sur l’étude pour le Palais de la Porte Dorée : consultez leur site web
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