A la demande de Marianne, l’IFOP a réalisé une enquête exclusive auprès d’un échantillon de 1014 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 à 30 ans. Cette enquête quantitative vise à comprendre quel regard portent les jeunes français sur l’assassinat de Samuel Paty et plus généralement, quel rapport ils entretiennent avec la religion et la laïcité. En voici les principaux enseignements :
Une situation jugée insatisfaisante concernant la lutte contre les actes et opinions hostiles aux minorités religieuses
La lutte contre les actes anti-musulmans et antisémites est jugée insatisfaisante par près des deux tiers des jeunes français (63% et 67%). Alors que les manifestations anti-pass sanitaire ont été émaillées d’incidents à caractère antisémite, les jeunes dressent même un constat plus sombre concernant la situation dans ce domaine ( -10 points par rapport à 2020).
Une fracture d’une partie de la jeunesse française concernant le rapport à la laïcité et aux religions
Les résultats de l’enquête montrent que dans son rapport à la religion, la jeunesse française se distingue –au moins en partie – des générations plus âgées. L’idée selon laquelle il faut respecter les religions afin de ne pas offenser les croyants est ainsi très largement ancrée au sein de cette génération (72%). Signe d’une sacralisation du fait religieux, les jeunes se montrent beaucoup plus partagés que leurs ainés concernant le caractère justifié d’une diffusion en classe de dessins caricaturant les religions (62% contre 78% au sein de l’ensemble de la population française).
Sur le plan du respect de la laïcité, les jeunes français sont nettement moins prompts à percevoir une dégradation : 63% estiment qu’elle est en danger en France, une proportion inférieure de 25 points à celle mesurée au sein de l’ensemble de la population française (87%).
En fait, dans la définition même qu’ils donnent de la laïcité, les jeunes se distinguent du reste de la population française. Ils estiment ainsi en premier lieu qu’il s’agit à travers la laïcité de mettre toutes les religions sur un pied d’égalité (27% contre 19%) et sont à l’inverse nettement moins nombreux à se reconnaitre dans l’idée d’une « laïcité de combat » visant à faire reculer l’influence des religions dans notre société (14% contre 26% pour l’ensemble de la population française).
La jeunesse française est partagée concernant l’adhésion à la loi de juillet 1981 sur la liberté de la presse
Corollaire d’une réticence à critiquer les religions, les 18-30 ans se montrent très partagés concernant la loi de juillet 1881 portant sur l’expression de critiques à l’encontre d’un symbole. Une courte majorité de jeunes s’y déclarent favorables (59%) contre à l’inverse 41% qui y sont opposés.
Près d’un jeune sur cinq ne condamne pas fermement l’assassin de Samuel Paty
L’assassinat de Samuel Paty est un évènement qui a très largement choqué (85%) et mis en colère (78%) les 18-30 ans. Pour autant, une part substantielle d’entre-eux se désolidarise de la démarche du professeur, voire ne condamne pas fermement l’assassin. 9% des sondés indiquent ainsi condamner l’auteur du meurtre mais partager certaines de ses motivations (9%), 5% ne le condamnent pas et 9% indiquent que cela les laisse indifférent.
Plus d’un jeune sur cinq estime par ailleurs que Samuel Paty a eu tort de montrer les caricatures car cela constituait une provocation inutile (22%). Une opinion qui est même partagée majoritairement par les jeunes musulmans (56%).
Enfin, relevons que 14% des jeunes estiment que derrière un objectif d’illustrer la liberté d’expression, cette initiative relevait en fait d’une démarche islamophobe (14%).