Conséquence de la fermeture partielle des établissements scolaires et du recours accru au télétravail, une partie des parents auront passé davantage de temps en 2020 et 2021 avec leurs enfants. Comment cette cohabitation s’est-t-elle passée ? Après un an de crise sanitaire et plusieurs périodes de confinement à domicile, quels sont les projets des familles pour l’été 2021 ? Synonymes d’activités en plein air et de rencontres, les séjours collectifs vont-ils connaitre un nouvel essor ? Afin de répondre à ces questions, la Jeunesse au Plein Air a missionné l’IFOP pour réaliser une enquête quantitative auprès des parents d’enfants âgés de 7 à 15 ans. En voici les principaux enseignements.
La crise sanitaire a été propice à un rapprochement au sein des familles
A rebours des commentaires médiatiques faisant état d’une cohabitation difficile au sein des foyers, les résultats de cette enquête montrent au contraire que la crise sanitaire a été aussi l’occasion pour les parents et les enfants de partager davantage de temps de qualité avec leurs enfants (76%). Les difficultés de cohabitation n’ont été vécues que par une minorité de parents : 43% ont des difficultés pour se concentrer et travailler en présence de leurs enfants, 39% font état de davantage de disputes et 30% ont souffert de la promiscuité, du manque d’intimité.
Mais un vécu plus problématique pour les parents en télétravail et les habitants de l’agglomération parisienne
Si au global, la cohabitation au sein des foyers s’est plutôt bien passée, le vécu des parents télétravailleurs apparait en revanche comme beaucoup plus problématique. 70% d’entre eux ont ainsi eu des difficultés pour se concentrer et travailler en présence des enfants (contre 26% de ceux ne télétravaillant jamais). Ils sont aussi significativement plus nombreux à avoir souffert de la promiscuité, du manque d’intimité (43% contre 21%). La cohabitation parents-enfants a été aussi plus éprouvante pour les familles de l’agglomération parisienne : 61% des parents ont peiné à se concentrer (contre 33% pour ceux des zones rurales) et 40% ont souffert de la promiscuité (contre 24% dans les communes rurales).
Les intentions de départ en colonies de vacances sont tièdes pour l’été 2021
Si l’on pouvait faire l’hypothèse qu’après une année de cohabitation forcée, les parents seraient désireux de s’éloigner de leur progéniture pendant quelques semaines, les résultats de cette enquête montrent au contraire une certaine frilosité dans les intentions de départ en colonies de vacances. La portion de parents désirant proposer à leurs enfants d’aller en colonies de vacances apparait comme particulièrement congrue (15%). Elle se situe peu ou proue à l’étiage de 2019 : 16% des sondés indiquent avoir proposé à leur(s) enfant(s) d’aller en colo à l’été 2019. La part de parents envisageant d’envoyer leur(s) enfant(s) en accueil de loisirs est un peu plus importante mais néanmoins minoritaire (30% contre 35% en 2019).
Plus globalement, les résultats de cette enquête donnent à voir la perte d’attractivité des colonies de vacances depuis une dizaine d’années
Nous avons fait le choix de reconduire dans cette enquête une question posée en 2011 par l’institut Harris interactive à un échantillon de parents d’enfants âgés de 5 à 19 ans portant sur la propension à faire participer ses enfants à un séjour en colo. Les résultats de l’enquête 2021 donnent à voir la perte d’attractivité des colos pour les familles françaises : désormais moins d’un parent sur deux envisage de faire participer à l’avenir son enfant à une colo, une proportion en forte érosion par rapport au niveau mesuré en 2011 (ils étaient à l’époque 64%, soit une baisse de 15 points).
Une évolution sociologique du profil des participants
Si les colos ont joué un rôle de brassage social et permis aux enfants des catégories populaires de partir en vacances, les résultats de cette enquête montrent que le profil sociologique des familles concernées a évolué. C’est en effet désormais parmi les catégories aisées que l’attrait pour les colos est le plus marqué : 27% des parents souhaitent proposer à leur(s) enfant(s) d’aller en colo cet été (contre 15% parmi les catégories pauvres, 14% pour les catégories modestes et 17% des classes moyennes). Plus globalement, la propension à faire participer son enfant à une colonie de vacances (quelle que soit la période de l’année) décroit de façon linéaire avec le niveau de revenu passant ainsi de 66% parmi les parents « aisés » à seulement 46% pour ceux des catégories pauvres.
Le prix des séjours apparait comme le 2e frein le plus largement cité par les parents qui ne souhaitent pas envoyer leur enfant en colo (élément avancé par 27% de ceux des familles pauvres). Plus largement, le prix du séjour apparait comme un critère de toute importance dans le choix d’un séjour, il s’agit du 2e critère le plus évoqué (31%), après les activités proposées (33%).
Pour autant, la baisse d’attrait des colonies de vacances ne saurait être résumée à la question du prix des séjours, la première raison avancée par les parents qui ne veulent pas que leur enfant aille en colo est ainsi le fait qu’ils sont disponibles pour passer les vacances avec eux et ne voient donc pas l’intérêt qu’il aille dans un centre d’accueil collectif (36%).
Le souhait de voir son enfant retrouver des activités et des temps collectifs avec des jeunes pèse fortement dans la décision des parents qui veulent proposer à leur enfant de participer à une colo
Si la crise sanitaire ne s’accompagne donc pas à ce stade d’une poussée des intentions de départ en colo ou en accueil de loisirs pour l’été 2021, cette dernière joue en revanche dans les motivations des parents concernées (35% des parents). Ces derniers estiment ainsi très largement que le fait de permettre à leur enfant de retrouver des activités sportives et culturelles (87% dont 55% « oui, beaucoup ») ou des temps collectifs avec des jeunes de son âge (85% dont 51% « oui, beaucoup ») pèsent dans leur décision. Relevons par ailleurs que si la perspective de bénéficier d’un « temps de répit » sans les enfants n’est évoqué « que » par un parent sur deux (58%), les sondés ayant souffert de la promiscuité au cours de l’année écoulée, sont significativement plus nombreux à dire qu’ils pourraient proposer à leur enfant d’aller en colo (64% contre 44% pour les autres).
Les colonies de vacances demeurent largement perçues comme contribuant à l’éducation de l’enfant, à son apprentissage de la vie
C’est un des paradoxes mis en évidence par cette étude, alors même que les colos souffrent d’une attractivité en berne, les parents demeurent très largement convaincus de leurs bienfaits éducatifs. Les ¾ d’entre eux estiment ainsi qu’elles contribuent à l’éducation de leur enfant, à son apprentissage de la vie. Une proportion proche de celle mesurée en 2011.
Le point de vue de François Legrand :
Alors même qu’elles sont synonymes d’activités en plein air et de rencontres, les colonies de vacances ne rencontrent qu’un écho modéré parmi les parents d’enfants âgés de 7 à 15 ans. Seulement 15% d’entre-eux envisagent de proposer à leur enfant de participer à un tel séjour pour l’été 2021. Plus globalement, les résultats de cette enquête donnent à voir à la fois la baisse d’attractivité des colos et les mutations sociologiques à l’œuvre autour des séjours collectifs. Historiquement vecteur de brassage social, les colos apparaissent aujourd’hui comme séduisant davantage les familles aisées. A cet égard, le déclin du modèle des colos constitue peut-être une illustration des clivages nouveaux qui traversent la société française.