IfopBeauty partage avec vous une nouvelle tribune issue des travaux et veilles que nous menons jour après jour dans notre département.
Aujourd’hui, l’espace public se remplit de remise en question de soi, du monde qui nous entoure, les esprits s’ouvrent à d’autres définitions du genre, de l’amour, à d’autres formes d’expression et de mode de vie. Il y a une prise de conscience ou du moins une oreille tendue envers certaines causes leur donnant une visibilité grandissante. La communication se transforme également, les campagnes publicitaires sont devenues des films à fortes valeurs émotionnelles où la marque n’apparaît que peu et l’espace est occupé par le message. Les marques osent prendre parti sur ces enjeux de société, quitte à déplaire.
1- LE GENRE
Le maquillage, le parfum font partie de l’expression de soi, l’expression de sa singularité ou son appartenance, sa conformité à un groupe. Le lien est tout établi entre les acteurs de la beauté et le questionnement du genre.
Depuis des décennies, le secteur de la beauté décrit et dicte la féminité. Aujourd’hui, on observe une tendance des marques à accueillir d’autre positionnement qu’une beauté uniquement féminine.
Le genderless en opposition à la dualité homme / femme
La définition de l’homme et de la femme existe toujours mais d’autre choix existe et cela s’observe dans les propositions de produits de beauté. Par exemple, les parfumeurs proposent des jus mixtes – comme le dernier Gucci, Mémoire d’une Odeur – quand Jean Paul Gaultier dévoile La belle et Le beau.
Le soin et le maquillage autrement
Le soin et le maquillage masculin s’exposent : les marques spécifiques dédiées aux hommes gagnent de l’espace, la ligne de maquillage Boy de Chanel. Sur les réseaux sociaux, les makeup les plus fous ont aussi pour modèle des hommes ou des personnes transgenres et certaines marques n’hésitent pas à les mettre en avant.
La communauté LGBTQ+
En juin dernier, la beauté est multicolore, en l’honneur du Pride month de nombreuses marques se sont revêtues du drapeau LGBTQ+ pour marquer leur engagement et leur soutien.
Des égéries transgenres incarne le renouveau de la beauté, c’est dernièrement Chanel qui a choisi Teddy Quinlivan pour sa ligne beauté.
La masculinité
Gillette s’exprime sur la masculinité toxique. Lors de sa dernière campagne « The best a man can be », le message a été reçu de manière très controversée, non sans impact sur le résultat de la marque. Certains y ont vu la diminution et l’accablement de l’homme, alors que le message de Gillette se voulait dans la mouvance #MeToo et démontrer que tous les hommes devraient se sentir concerné pour un monde plus égal.
2- LE BODY POSITIVISME
Le marché de la beauté explore une beauté masculino-féminine, mais aussi une beauté féminine plus réelle, plus vraie (le « Body-positive ») : les poils, les vergetures, la cellulite, l’acné. Sur la toile les marques se font caisse de résonnance de l’acceptation du corps de la femme actuelle, un corps qui n’est pas lisse de toutes parfaites imperfections. De l’acceptation cela en devient une revendication. Les mannequins sont de moins en moins retouchés, celles qui ne pouvaient accéder au métier auparavant sont désormais sous le feu des projecteurs pour leur singularité car elles cassent les standards (vitiligo, monosourcils, trisomie, …). Ramener la beauté réelle est au cœur de la démarche, c’est presque antithétique ou schizophrénique avec ce qu’on observe sur les réseaux sociaux (recherche de perfection, filtres). Deux mondes se côtoient sans se nuire, les Kardashian, et les Ashley Graham avec le même objectif : l’acceptation. Accepter la recherche effrénée de l’idéal, on en vient à accepter la naturalité d’un corps qui vit (et qui subit !)
La diversité des marques, des influences et des visages dans le monde de la beauté tend à créer un espace d’expression libre et infini qui accueillera chacun(e), avec ses propres convictions mais sans étiquettes.
3- LA PRESSION DU MARIAGE EN ASIE
Outre Gillette, une autre marque du groupe Procter & Gamble s’est lancée dans un film à message. Avec #Changedestiny, SK-II entend endiguer la pression sur le mariage en Asie.
Depuis 2015, #Changedestiny est une campagne contre la pression sur le mariage. En effet en Chine, le mariage est une étape importante dans la vie d’une femme, il est attendu par l’entourage et marque le début de la vie d’épouse puis de mère. Depuis quelques années, certaines femmes issues des millenials et Gen Z aspirent à un parcours de vie différent où leur développement personnel passera avant le mariage. Cette génération incarne des femmes plus sûres d’elles, à la recherche de liberté et d’indépendance qui vont prioriser leur bien-être avant tout, à contre-courant de la pensée traditionnelle.
En 2019, Meet me halfway inscrit l’engagement de SK-II dans la continuité de Change Destiny, on découvre au travers d’une vidéo des femmes qui veulent réconcilier le respect des traditions envisagé pour elles par leurs parents et leur propre envie d’émancipation, à la recherche de liberté et d’indépendance.
4- LE CYBER-HARCÈLEMENT
Aujourd’hui tout se partage, chacun peut s’exposer au monde via Internet. Et gare au haters ! La bienveillance n’est pas toujours la règle d’or. L’année dernière, Rimmel a voulu dénoncer le cyber-harcèlement lié à la beauté, un problème qui touche 25% des femmes dans le monde. L’engagement Rimmel : faire du cyber-espace un lieu d’expression libre. #IWillNotBeDeleted
Les résultats de leur enquête en quelques chiffres :
Source : Etude Rimmel sur 11 000 femmes âgées de 15 à 25 ans à travers 10 pays
5- LA SENSIBILITÉ AU CLIMAT
Le réchauffement climatique est au cœur des préoccupations. Les marques tendent à adapter la formulation des produits, à réduire l’impact des packagings (recyclables, rechargeables, moins d’emballage) pour créer des produits au cycle de vie durable avec un impact écologique moindre.
LUSH est parmi les pionniers à s’être dénudé d’emballage autour de ses produits cosmétiques. Et c’est pour montrer son engagement autant qu’éveiller les consciences que le 20 septembre 2019, l’enseigne s’est mis en « grève » fermant boutique, usine et même son site internet. Ce vendredi 20 septembre avait lieu une des marches pour le climat, preuve que ce mouvement à trouver du soutien dans la sphère économique.
©Lush
Les marques utilisent leur pouvoir de communication pour interpeler, informer, délivrer. Pour autant, elles ne doivent pas tomber dans le piège de la récupération en réagissant uniquement sur l’actualité mais inscrire leur engagement dans une logique continue. Leur « soft power » doit s’utiliser à bon escient pour donner une voix, une visibilité, pour passer les bons messages, en cohérence avec la personnalité de leur marque. Une inadéquation mène à la controverse voire au Bad Buzz. L’ennemi numéro un pour l’image des marques, à l’heure où les réseaux sociaux relaient autant l’information que les commentaires.
Gabrielle Dufossé – Chargée d’Etudes – Beauty
JingWei Wen – Chargée d’Etudes – Beauty
Clara Dubreuil – Chargée d’Etudes – Beauty
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