Les résultats de cette enquête Ifop pour Sud Ouest-Dimanche font apparaître une attitude paradoxale des Français face à l’Europe. Si d’un côté, nos concitoyens se montrent majoritairement favorables à certaines nouvelles étapes de la construction européenne, ils émettent dans le même temps un jugement extrêmement sévère et dur sur l’Union Européenne.
La crise, qu’on a d’ailleurs appelée à l’un de ses stades de développement « crise de l’Euro », a puissamment contribué à entretenir ce rapport paradoxal à la construction européenne. De par son ampleur et sa violence, elle a renforcé dans l’opinion l’idée que la France devait nécessairement s’allier et coopérer davantage avec ses partenaires et voisins européens. Si l’adage « l’union fait la force » avait déjà été régulièrement utilisé par les promoteurs de l’idée européenne à différentes périodes, la très grave crise que le monde traverse depuis 2008 lui a conféré une acuité particulière et bon nombre de nos concitoyens estime qu’une France isolée aurait été emportée ou balayée.
Mais dans le même temps, et dans un mouvement contradictoire, la crise a également révélé au grand jour les vices de construction de l’édifice européen. L’absence d’harmonisation sociale et fiscale et un élargissement non maîtrisé ayant entraîné une paralysie du processus de décision politique et une forte hétérogénéité des niveaux de développement sont venus saper l’attachement des Français à l’idéal européen. A l’occasion de la crise, le projet européen n’a non seulement pas tenu ses promesses (l’Europe n’ayant pas été épargnée) mais il est même devenu source de craintes et de colère car synonyme de soutien coûteux aux économies du sud de l’Europe, de délocalisations et de flux migratoires non contrôlés.
Dans ce contexte, 74 % des personnes interrogées déclarent qu’au moment de voter lors des prochaines élections européennes en mai 2014 elles souhaiteront plutôt exprimer leur méfiance à l’égard de l’Europe telle qu’elle se construit actuellement contre seulement 26 % désirant plutôt manifester leur confiance. Ce rapport de force illustre à lui seul la très large défiance dont est victime la construction européenne, mais la mise en perspective avec les résultats à cette même question posée en mai 1999, à la veille d’autres élections européennes, témoigne plus encore de ce processus.
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